Pinceaux et cordes
Publié le : 8 Mai 2017
La guitare, aujourd’hui liée intimement à la chanson, est devenue l’image même de l’instrument moderne sous ses différentes formes, depuis la guitare dite sèche dont les chanteurs de variétés s’accompagnent jusqu’à la guitare dite électrique, symbole du rock et autres formes actuelles de la chanson.
Mais il s’agit, en réalité, d’un instrument très ancien puisqu’il était connu dès le treizième siècle où il accompagnait les troubadours. C’est à la fin du dix-neuvième siècle que la guitare s’est stabilisée dans les dimensions que nous lui connaissons. A l’époque de Vermeer, la guitare est plus petite, la caisse moins large que ce que nous connaissons et le nombre de cordes moins important : aujourd’hui une guitare possède six cordes simples. A l’époque baroque elle n’en possédait que cinq, chacune étant doublée pour enrichir la sonorité. Comme son frère le luth, la guitare était pratiquement exclusivement un instrument de l’intimité comme nous le montre Vermeer : son répertoire est assez riche tant pour accompagner le chant que comme instrument soliste.
Robert de Visée, dont nous écoutons une page, fut « Maître de guitare du Roi » Louis XIV à Versailles.
Le Virginal est un instrument à clavier de la même famille que le clavecin. C’est l’instrument par excellence de la demeure privée par ses dimensions réduites et malgré cela par la richesse de sa sonorité.
Deux caractéristiques évidentes permettent d’identifier facilement le virginal : les cordes sont disposées parallèlement au clavier, ce qui permet de réduire l’instrument à des dimensions modestes et le clavier est décalé vers la droite, ce que l’on faisait uniquement en Flandre et aux Pays-Bas.
Nous écoutons une Toccata jouée au virginal de Jan Pieterszoon SWEELINCK (1562-1621) : il eut une carrière paradoxale. Organiste de la Oude Kerk à Amsterdam, il ne participa jamais au culte puisque le calvinisme de cette époque refusait tout instrument, mais se faisait entendre chaque semaine à l’occasion d’auditions d’orgue en dehors des offices. D’autre part, il ne quitta pratiquement jamais sa bonne ville et fut pourtant le formateur de nombreux organistes d’Europe qui venaient travailler sous sa direction.
Le clavecin nous et plus familier. Cet instrument, image même de la musique baroque, a connu au vingtième siècle une renaissance étonnante avec Manuel de Falla ou Francis Poulenc qui lui ont consacré chacun une œuvre majeure.
Les cordes du clavecin sont disposées perpendiculairement aux claviers : l’instrument est de ce fait plus volumineux. Il comporte plusieurs rangs de cordes (trois dans les grands instruments) que l’on joue sur deux claviers. L’ampleur du meuble, les larges surfaces qu’offre le couvercle sont une invitation pour les peintres décorateurs d’exercer leur talent : Vermeer nous donne dans son tableau une image d’un clavecin ainsi orné.
Nous écoutons du même Sweelinck des variations sur une chanson très en vogue aux 17/18ème siècles dans les Pays-Bas : Ma jeune vie a une fin.
A titre de cadeau printanier, voici un extrait du Concerto champêtre de Francis Poulenc (1899-1963) qui date de 1930, œuvre majeure de la renaissance du clavecin au vingtième siècle.
Article très intéressant, bravo à Emmanuel Bellanger!