Aller au contenu. | Aller à la navigation

Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

Bonjour, notre site va bénéficier d’une refonte dans les prochains mois. L’activité de Narthex est actuellement réduite. Nous vous remercions de votre compréhension.

Les stigmates de l’Histoire : le Prieuré de la Charité-sur-Loire

Publié le : 27 Mars 2019
Située dans le Val de Loire, dans le département de la Nièvre, l'église du Prieuré de la Charité-sur-Loire incarne l'ampleur et la majesté de l'architecture clunisienne, quintessence de l'art roman bourguignon. La sérénité qui émane des lignes de cette église prieurale contraste avec l'Histoire mouvementée traversée par la région, dont les saccages et les destructions ont mutilé Notre-Dame de la Charité-sur-Loire - qui fut le plus vaste édifice de la chrétienté après Cluny. L'église est inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO.

En partenariat avec

Vue du chevet du Prieuré de Notre-Dame De la Charité-sur-Loire, Nièvre, Bourgogne, France © photo : Yann Gwilhoù

Un peu d'histoire...

L’état actuel de l’église prieurale de La Charité-sur-Loire témoigne de sa douloureuse histoire. Ce monument a succédé à des édifices dont la construction est difficile à dater avec précision. En ce lieu fut fondée une première abbaye au VIIIe siècle, qui suivit la règle de Saint-Basile. Détruite par les Vandales, elle fut reconstruite en l’an 771 par des moines bénédictins. A nouveau saccagé, le monastère fut donné par le comte de Nevers Guillaume II à Saint-Hugues, abbé de Cluny. Mais son histoire mouvementée ne s’arrête pas avec l’édification de l’église actuelle. Cette contrée des bords de Loire a été durement affectée par les guerres de Religion au XVIe siècle. Le traité de Saint-Germain (1570) reconnut La Charité comme place forte des Protestants. De nombreux massacres et destructions avaient précédé la signature de ce traité qui, malheureusement, n’a rien apaisé. Les évènements de la Saint-Barthélemy (1572) ont poursuivi des destructions déjà bien entamées.


L’église Notre-Dame de La Charité-sur-Loire reste impressionnante par ses dimensions, son architecture et son ornementation, ses blessures et ses amputations. Elle se présente aujourd’hui en trois parties : le chœur et le transept des XIe et XIIe siècles que domine à la croisée nef/transept une massive tour octogonale dite « Tour de la Bertrange » du nom de la forêt proche dont furent tirés les arbres de la charpente, les quatre premières travées de la nef reconstruites au XVIIe siècle, la haute tour occidentale et des éléments de façade aujourd’hui séparés du reste de l’église par une cour. 
L’église Notre-Dame de La Charité-sur-Loire a été avant ses destructions le plus vaste édifice de la chrétienté après Cluny.

Vue du chœur de Notre-Dame de la Charité-sur-Loire © photo : Allie_Caulfield

La pierre illuminée par les vitraux de Max Ingrand

Chœur et transept sont l’image même de l’architecture clunisienne, comme l’église de Paray-le-Monial, presque une sœur de La Charité. On se trouve ici devant un saisissant exemple de l’art roman bourguignon. Le chœur est éclairé par huit fenêtres hautes, au-dessous desquelles court une belle arcature, l’hémicycle soutenu par de légères colonnes aux chapiteaux finement sculptés. Une coupole sur trompes domine la croisée, colonnes et pilastres cannelés animent les murs. La belle pierre locale resplendit sous les couleurs que lui donnent les vitraux de Max Ingrand posés en 1957.
Le chevet extérieur de l’église donne au regard de monter depuis les chapelles du déambulatoire jusqu’à la toiture en passant par les contreforts du vaisseau principal. L’architecture des chapelles rayonnantes avec leurs colonnes engagées et leurs modillons sous la toiture n’est pas sans évoquer une influence poitevine.

La nef épargnée grâce à Prosper Mérimée

La Charité-sur-Loire se situe à une trentaine de kilomètres au nord de Nevers, presqu’au milieu du cours de la Loire. Un gué est à l’origine de l’occupation du lieu situé au carrefour de grands axes de circulation : l’axe nord/sud (la fameuse route nationale 7 devait passer juste à la place de la nef, c’est Mérimée qui obtint de la dévier), l’axe est/ouest entre l’Océan et l’Europe centrale. Le pont de La Charité est un des plus anciens sur la Loire. Il date du XVIe siècle. Il faut arriver par la route de Bourges pour admirer la plus belle vue sur la petite ville : le fleuve, les toits serrés autour du vieux clocher, l’église elle-même.

Le Tympan de la Vierge Marie de Notre-Dame de la Charité-sur-Loire  © photo : MOSSOT

Le Tympan de la Vierge Marie

Il reste deux tympans romans à La Charité. Le premier sur la façade ouest, au pied du haut clocher, son emplacement d’origine. Il est consacré à la Vierge Marie, évoquant les évènements de la Nativité tels qu’elle les a vécus. Au linteau (la partie inférieure du tympan) on suit de gauche à droite les épisodes de l’arrivée du Christ en notre chair et le rôle de Marie : l’Annonciation, la Visitation à Elisabeth, la Nativité et l’annonce aux bergers. Ces scènes ont quelque chose d’oriental dans les drapés des vêtements, la manière dont les femmes ont couvert leurs têtes. Mais c’est le tympan qui est le plus intéressant : le Christ en occupe le centre dans une mandorle (cadre en forme d’amande) qui indique sa divinité. Il bénit de la main droite et accueille sa mère de l’autre main. Il est représenté de biais, ce qui est très rare au XIe siècle. Marie semble flotter dans les airs à la rencontre de son Fils : ses mains franchissent le bord de la mandorle, entrant ainsi dans l’éternité auprès de Lui. Elle est comme aspirée vers le Ciel : l’Assomption de Marie ne sera reconnue par le pape que bien plus tard, mais on la célébrait déjà au Moyen-Âge. Anges et moines encadrent la scène.

Le Tympan de la Transfiguration de Notre-Dame de la Charité-sur-Loire  © photo : Selbymay

Le Tympan de la Transfiguration

Le second tympan se trouve à l’intérieur de l’église, au fond du transept sud, à droite. C’est Prosper Mérimée qui l’a fait installer à cet endroit. Ce tympan poursuit l’histoire que raconte le premier. C’est le Christ qui est ici célébré par trois scènes qui ont toutes un point commun. Au linteau de gauche à droite : l’adoration des Mages et la Présentation de Jésus au Temple. Au tympan nous est offerte une des premières représentations de la Transfiguration de l’histoire. Le Christ illuminé dans une mandorle bénit de la main droite et tient un livre de la gauche. Moïse et Elie épousent la forme de la mandorle et de la courbe de l’arcade. Pierre, Jacques et Jean esquissent une sorte de génuflexion. Nous sommes ici presque devant une scène liturgique. Ces trois évènements sont trois épiphanies du Seigneur : sa nature divine est manifestée, dévoilée aux yeux et aux oreilles des hommes : les paroles du vieillard Syméon, les révérences des Mages.

Un chapiteau de Notre-Dame de la Charité-sur-Loire © photo : MOSSOT

Un chapiteau roman

Ce chapiteau est l’un des 450 que l’on trouve dans cette église : sur les colonnes du chœur où se trouve ce chapiteau, sur l’arcature aveugle au-dessous des fenêtres hautes, le long du mur du déambulatoire, à l’intérieur et à l’extérieur de cette église. Les sculpteurs romans aimaient laisser vagabonder leur imagination au gré de leur fantaisie en peuplant les églises de toutes sortes d’êtres vivants. On trouve une trentaine de représentations de lions à La Charité : animal protecteur de l’Eglise ? Ce chapiteau traduit bien la virtuosité des artistes de ce temps qui ont su admirablement modeler le corps animal à l’architecture : deux bêtes affrontées, dans une torsion qui n’est pas naturelle et pourtant qui suggère une grande souplesse. La symétrie de ces fauves s’harmonise avec la forme même du chapiteau. L’expérience spirituelle passe aussi par l’admiration des formes, la richesse des imaginaires, quoi qu’en ait pensé Saint-Bernard.

Le Jardin des moines

Depuis quelques années, des fouilles et restaurations importantes ont été réalisées : un projet, heureusement annulé, de construction d’un centre médical en arrière du chevet a été l’occasion de mettre au jour les fondations d’édifices qui ont précédé l’église actuelle et d’ouvrir au public tout cet espace appelé le Jardin des moines, d’où la vue sur ledit chevet est magnifique. D’autre part, les bâtiments subsistants de l’ancien prieuré ont été admirablement restaurés. Ils hébergent tout au long de l’année des manifestations diverses, culturelles principalement comme la Foire aux Livres de printemps, le Festival du mot en mai, les Journées européennes des métiers d’art, la Nuit du livre, des concerts et des expositions tout au long de l’année. Ces bâtiments, en partie reconstruits au XVIIIe siècle, ont gardé deux ailes du cloître, des escaliers aux rampes ouvragées et quelques belles pièces lambrissées.

SOURCES BIBLIQUES

Le vieillard Syméon a reconnu en Jésus celui qu’annonçaient les Prophètes, le Fils de Dieu. Dans un beau geste qui le montre élevant l’enfant vers le ciel, les mains couvertes d’un linge en signe de respect, il s’écrie : « Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples : lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à son peuple Israël. » (Luc 2, 29-31)
C’est bien cette lumière divine qu’a vue Syméon qui se donne à voir aux apôtres Pierre, Jacques et Jean sur le Thabor, cette lumière que nul n’avait contemplée, que l’Evangéliste essaie de décrire avec ses simples mots : «  Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et Il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Elie apparut avec Moïse et tous deux s’entretenaient avec Jésus. » (Marc 9, 2-4) 

Emmanuel Bellanger

--

Cet article a été rédigé dans le cadre du partenariat établie entre Narthex et la revue papier Le Monde de la Bible. Il a été publié dans le numéro 227 - janvier 2019. Cette revue trimestrielle a confié à Narthex le soin de nourrir la rubrique « La Bible des pierres » depuis décembre 2015. → Retrouvez tous les articles issus de cette collaboration.

 

BIBLIOGRAPHIE

Le prieuré de la Charité, histoire et renouveau, Edité par le Prieuré de la Charité, cité du Mot
Juin 2016.
Michel Pastoureau, Bestiaires du Moyen-Âge, Editions du Seuil, 2011

 

Informations pratiques

Le Prieuré Notre-Dame de la Charité-sur-Loire est situé 9, impasse Sainte-Croix à La-Charité-sur-Loire (58400)

Informations : Office du Tourisme
33+(0)3 86 70 15 06
Site : www.lacharitesurloire-tourisme.com

 

 

 

Ajouter un commentaire

Vous pouvez ajouter un commentaire en complétant le formulaire ci-dessous. Le format doit être plain text. Les commentaires sont modérés.

Question: 10 + 4 ?
Your answer:
Recherchez sur le site
Inscrivez-vous à la newsletter