
Le parcours se concentre particulièrement sur les grands retables de la collection, dont la scénographie soignée permet d’en admirer toutes les faces. Les retables, qui constituaient un élément essentiel de la dévotion au Moyen Âge, étaient composés de volets peints bilatéralement. Ils n’étaient ouverts que pour les grandes fêtes suivant le calendrier liturgique. On apprend ainsi que les donateurs et mécènes appréciaient de figurer à une place de choix, c’est-à-dire dans les volets intérieurs centraux, au plus près des représentations des scènes de la vie du Christ. Sur les volets externes figuraient souvent les saints protecteurs de l’église ou de la ville. On trouvait aussi parfois d’autres éléments de décors, le plus souvent des végétaux, comme la liane en référence à la racine de Jessé. Outre leur aspect décoratif, ces éléments au verso avaient aussi une dimension conservatoire : peindre le revers permettait de mieux conserver le support en bois. Les versos des œuvres font également la part belle aux armoiries de toutes sortes. Leur présence permettait d’identifier les personnes représentées ou les commanditaires.

Le verso le plus remarquable est sans doute celui du Portrait de David Joris, réalisé par un artiste néerlandais anonyme. David Joris s’était installé à Bâle en 1544 et avait prospéré économiquement et socialement, suscitant l’admiration générale. L’homme, qui avait vécu à Bâle sous un faux nom, était en réalité recherché en tant qu’« hérétique ». Après sa mort en 1556 on découvrit a posteriori qu’il était membre des « anabaptistes ». Il fut condamné de manière posthume mais son portrait fut conservé et une inscription en latin et en allemand fut apposée pour révéler la « vraie nature » de l’homme : elle devait servir d’avertissement à la population.
Outre quelques artistes célèbres tels Hans Baldung dit Grien, Lucas Cranach et Konrad Witz, ce sont principalement des œuvres d’anonymes germaniques et flamands des 14e au 17e siècles qui sont exposées, mettant en lumière une collection habituellement reléguée aux réserves du musée. Exigeante, l’exposition s’adresse en premier lieu aux connaisseurs mais laisse place à de belles découvertes pour tout un chacun.

Chloé Tuboeuf Bizzotto