Aller au contenu. | Aller à la navigation

Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

Bonjour, notre site va bénéficier d’une refonte dans les prochains mois. L’activité de Narthex est actuellement réduite. Nous vous remercions de votre compréhension.

Hildegarde de Bingen : « Causae et Curae » (Les Causes et les Remèdes)

Publié le : 2 Avril 2020
Voici la première parution d'une nouvelle série proposée par Martine Petrini-Poli, consacrée aux œuvres naturalistes et médicales d’Hildegarde de Bingen (1098-1179), qui font suite aux précédentes publications de Narthex, sur sa trilogie mystique, où elle décrit ses visions. Extraordinaire figure du XIIe siècle, abbesse bénédictine et musicienne, Sainte Hildegarde a eu de remarquables intuitions médicinales, étayées par ses observations de la nature.

La trilogie visionnaire de l’abbesse allemande Hildegarde de Bingen (1098-1179) a été présentée dans les articles de juin 2016 à juillet 2017. En 1151, elle publie le Liber Scivias (Sache les voies), richement enluminé. Elle rédige, entre 1158 et 1173, le Liber Vitae Meritorum (Livre des Mérites de la Vie). En 1174, le Liber Divinorum Operum (Livre des Œuvres divines), dont un manuscrit du XIIIe siècle (Lucques) est abondamment illustré, clôt cette trilogie. Parallèlement, Hildegarde expose son savoir naturaliste et médical dans le Liber subtilitatum diversarum naturarum, vers 1150-1160. Dès le XIIIe siècle, la matière de ce traité se diffuse sous la forme de deux ouvrages distincts, la Physica et le Causae et Curae.


Hildegarde de Bingen est l'auteur d'une œuvre scientifique appelée Physica dont on connaît à ce jour cinq manuscrits complets et différents extraits copiés aux XIVe-XVe siècles, qui suscitent de plus en plus d'intérêt. Physica est un traité scientifique, en 9 livres, appelé aussi Liber simplicis medicinae, traitant des plantes, des éléments, des arbres, des pierres, des poissons, des oiseaux, des quadrupèdes, des reptiles et des métaux. Il est considéré par certains comme une des deux parties du Liber subtilitatum diversarum naturarum creaturarum (Livre des subtilités des créatures divines). Le titre « Physica » a été donné par l'édition princeps de Schott, à Strasbourg, en 1533.

Création du monde (détail), Bible de Souvigny, vers 1180-1200, H 56 cm x L 39 cm, enluminure sur parchemin, Bibliothèque municipale de Moulins

Divers fragments mentionnés dans le manuscrit de Berlin (Staatsbibliothek Preußischer Kulturbesitz, lat. 4º 674, fol.103ra-va, daté vers 1220) ainsi que des citations dans d'autres manuscrits et traités médicaux permettaient de supposer l'existence d'un travail médical de Hildegarde différent et complémentaire de Physica. L'existence de ce travail a été confirmée lorsque Jessen a trouvé un manuscrit du XIIIe siècle intitulé Hildegardis Curae et Causae (Les Causes et les Remèdes d’Hildegarde) à la Bibliothèque royale de Copenhague en 1859, suite au pillage d'un monastère allemand. À la fin du XIXe siècle, Paul Kaiser prépare l'édition de l'original latin, que Teubner publie sous le titre Hildegardis, Causae et curae (Leipzig, 1903).

Structure de l'ouvrage « Les Causes et les Remèdes »

Les deux grands volets de l’ouvrage Les Causes et les Remèdes se déclinent suivant cinq livres de longueur variable :

Le LIVRE 1er se présente comme un récit sur la Création, et contient à la fois une cosmologie et une cosmographie. Il traite de la création et expose comment le monde et les anges ont été créés, la chute de Lucifer, les étoiles et les forces de la nature, leur signification et leurs propriétés, le firmament et l'influence de tous ces éléments sur l'être humain.

Le LIVRE II, très volumineux, aborde à son tour la question des origines du monde en s’inspirant de la Genèse. Il traite de l'homme depuis sa conception, des animaux, des maladies et de leurs causes, des organes et des membres de l'être humain. Il montre comment le péché d'Adam a affecté la nature humaine, les différents tempéraments humains et les mécanismes des maladies qui leur sont propres, sous l’influence de la théorie des humeurs et des tempéraments, héritée d'Hippocrate et de Galien. Il évoque le rire, les larmes ou les soupirs, le plaisir sexuel et l'ivresse, le moment propice à la cueillette, à la moisson et à la plantation de la vigne. Il développe diverses considérations sur la conception, le sexe des enfants à naître, le développement de l'homme, et la relation entre l'âme et le corps. Il traite du sommeil et décrit les maladies, les fièvres, la paralysie, les parasites et la douleur dans les différents organes et fonctions ; mais il n’aborde pas la guérison des maux.

Les LIVRES III et IV traitent de la guérison des maladies pour lesquelles les remèdes sont indiqués. Cette partie de guérison est précédée d'un avertissement précis : les médicaments décrits et montrés par Dieu peuvent guérir l'homme, à moins que Dieu ne le rappelle à Lui.

Le LIVRE V traite de sémiologie médicale, en exposant les signes de vie et de mort qui apparaissent dans les yeux, l'urine (uroscopie) et le pouls, ce qui peut donner des indications sur la possibilité de guérison du patient. Enfin, il considère la lunaison complète divisée en trente étapes, et établit une caractérologie surprenante des êtres humains selon le stade dans lequel ils ont été conçus. Cet horoscope est comparable aux nombreux lunaria alors très diffusés. Il y joint le portrait de l'enfant à naître en fonction de l'état de la lune, non au moment de sa naissance, mais lors de sa conception.

Les écrits d’Hildegarde relatifs à la médecine sont influencés par la doctrine antique des humeurs du corps et des tempéraments des médecins grecs, Hippocrate et Galien, que l’on christianise en la replaçant dans la vision divine de la Création. A cela s’ajoute l’influence d’autres auteurs de l’Antiquité et du Haut Moyen Âge, ainsi que le savoir médical populaire. « Avant tout et par-dessus tout, on prendra soin des malades, et on les servira comme s’ils étaient le Christ en personne » telle est la règle de saint Benoît suivie par les moniales et la mère abbesse de l’abbaye de Bingen, puis de Ruperstberg en Rhénanie.

Martine Petrini-Poli

Création du monde, Bible de Souvigny, vers 1180-1200, H 56 cm x L 39 cm, enluminure sur parchemin, Bibliothèque municipale de Moulins
Agnès Jones
Agnès Jones a écrit :
27/09/2020 22:54

Passionnant

Valérie de Maulmin
Valérie de Maulmin a écrit :
28/09/2020 10:18

Merci !

Ajouter un commentaire

Vous pouvez ajouter un commentaire en complétant le formulaire ci-dessous. Le format doit être plain text. Les commentaires sont modérés.

Question: 10 - 5 ?
Your answer:
Martine Petrini-Poli

Martine Petrini-Poli, professeur de lettres (titulaire du CAPES et du Doctorat de 3ème cycle) en classes préparatoires HEC au Lycée de Chartreux et à l’Ecole des Avocats de Lyon (EDA), rédactrice à Espace prépas, Ellipses et Studyrama. Responsable de la Pastorale du Tourisme (PRTL 71).

Recherchez sur le site
Inscrivez-vous à la newsletter