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L’art de la croix - La croix dans l’art. Entre tradition et réinterprétations : un symbole universel ?

Publié le : 5 Janvier 2017
C’est une réflexion artistique au sujet atypique, assumé, et traité avec justesse, qui a attiré l’attention de Narthex : au cœur du Marais parisien, la galerie polonaise « Roi Doré » présente jusqu’au 4 février 2017 l’exposition « L’art de la croix. La croix dans l’art ». La soixantaine d’œuvres regroupées, à vendre ou issues de collections privées, de tous médiums, datant de toutes les époques (de 2000 av. JC à aujourd’hui) et de différentes cultures, racontent « l’évolution » du motif de la croix à travers les siècles. Le vaste répertoire de ces représentations permet de constater l’omniprésence de la croix, de l’iconographie pré-chrétienne et chrétienne, aux inspirations dans l’art profane et dans les œuvres d’artistes contemporains.

Gauche: Vladimir Velickovic, Grünewald, 2003, acrylique sur papier 142 x 114 cm ©Galerie Roi Doré
Droite: Dimitrije POPOVIC, Crucifixion du cycle Corpus Mysticum, 1986, technique  mixte, n°1/5, 100x70 cm ©Galerie Roi Doré

Cette juxtaposition d’ « hier » et d’ « aujourd’hui » réalisée par la galerie polonaise sur le symbole de la croix, rend également honneur au 1050e anniversaire du baptême de la Pologne. Celui-ci a lieu en 966 et marque l’entrée du pays dans la communauté des pays européens christianisés au Moyen Âge ; forgeant par là même son identité religieuse et culturelle. Ainsi c’est de ces racines que provient le signe de la croix devenu universel. Les interprétations et réinterprétations constantes de ce motif montrent combien il est associé aux questions existentielles et métaphasiques liées au sens de la vie, de sa fin et de ce qui s’ensuit…

« Dans les œuvres de divers artistes, indépendamment de leur façon de percevoir le monde et de leur religion, de nombreuses représentations de la croix ont été créées et continuent d’être créées, parce que la signification de ce symbole est très large. De sorte que pour chaque artiste il peut représenter autre chose : une simple intersection de deux lignes droites à la métaphore de la vie humaine, au croisement du chemin terrestre de l’homme et de la dimension divine ou bien aux recherches existentielles. Par conséquent, la croix peut être considérée comme un symbole universel, une sorte d’archétype commun à tous les humains. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

gauche: Basil Ivan RAKOCZI, Crucifixion sur fond noir, gouache sur papier, 65 x 50cm ©GALERIE ROI DORÉ
Droite: Basil Ivan RAKOCZI, Crucifixion sur fond gris, gouache sur papier, 70 x 48 cm  ©GALERIE ROI DORÉ

Il n’est donc pas surprenant qu’avec le temps, ce symbole devenu si populaire, soit passé du domaine purement rituel à la sphère de l’art, d’abord sacré puis plus tard également profane. Si l’histoire de l’iconographie de la croix est liée à l’histoire du christianisme lui-même, -et donc à l’histoire politique, sociale et culturelle du monde depuis plus de 2000 ans -, elle devient, pour les artistes contemporains un point de départ de leurs propres recherches picturales et conceptuelles, parfois très audacieuses. Les deux tableaux de Basil Rakoczi constituent des exemples parfaits de ce passage du motif du religieux vers le domaine esthétique expérimental. Ils témoignent également de la fascination de l’artiste pour l’imaginaire, les mythes et les archétypes collectifs. Les Crucifixions de Rakoczi illustrent ainsi parfaitement la manière dont de nombreux artistes des XXe et XXIe siècles réduisent le thème religieux à un terrain fécond aux expériences picturales.

Dans les tableaux de Beksinski se référant à des thèmes religieux, l’artiste oscille constamment entre l’horreur de la couche littérale de l’histoire de la crucifixion et son sens spirituel, tout en présentant ce motif de manière originale d’un point de vue purement plastique.

Dans la lithographie de Jacques Villon, le sujet biblique n’est qu’anecdotique. Certes, le Christ et les larrons sont relativement faciles à reconnaître, de même que la foule aux pieds de la croix, mais l’identification plus précise est quasiment impossible et la présence du deuxième larron reste hypothétique. Au bout du compte, la scène se transforme en un vitrail multicolore, où le jeu des couleurs et des formes attirent davantage l’attention qu’un message religieux quelconque. Il en est de même dans le cas de la Crucifixion de Pollock, où les formes reconnaissables disparaissent peu à peu : un fragment de la croix et de la figure du Christ sont encore identifiables, mais l’ensemble se transforme en une mosaïque expressionniste.

Zdzislaw Beksinski, DG-2298, 1970, huile sur isorel 150 x 120 cm ©GALERIE ROI DORÉ

 

 

gauche: Jacques VILLON, Le Christ, 1961, lithographie en couleurs sur vélin EA, 66 x 51 cm ©GALERIE ROI DORÉ
droite: Jackson POLLOCK (Attribué à), Crucifixion, technique mixte sur papier, 33 x 28 cm (reproduction du tableau original, env.1940, gouache sur papier, 55 x 39 cm, collection particulière)  ©GALERIE ROI DORÉ

Nous retrouvons un autre exemple de cette frontière difficile à cerner entre les connotations religieuses et les recherches profanes dans l’affiche de Michal Batory « Charlie Hebdo », réalisée en réaction au massacre dans la rédaction de la revue parisienne en janvier 2015. […]

L’affiche de Batory n’a pas de signification religieuse au sens propre du terme, mais certains aspects caractéristiques de la symbolique de ce motif dans l’art chrétien y sont tout de même présents, notamment une sorte de dualisme entre la brutalité du récit et son interprétation spirituelle. En effet, la croix évoque sans doute une mort violente, mais également – selon l’idéologie chrétienne- la victoire ultime de la victime.

Toute référence religieuse disparaît par exemple des photographies de Stern. Une Marilyn Monroe à moitié nue barrée d’une croix orange claire constitue une antithèse absolue de la signification de la croix dans le christianisme, tout en étant une conclusion parfaite de la révolution picturale. Ainsi l’artiste s’approprie et utilise le symbole chrétien à ses propres fins, d’autre part il le juxtapose à une icône laïque du monde moderne tout aussi reconnaissable pour les membres de cette culture que le motif de la croix l’est pour les chrétiens.

Michal Batory, Je suis Charlie, 2015, affiche 100 x 70 cm ©GALERIE ROI DORÉ

Des crucifix de métal à la multiplication des interprétations de la croix dans des affiches, photos, peintures, vidéos, gravures, etc., l’exposition de la galerie Roi Doré explore le sens de cet élément de la Passion du Christ à travers les siècles. Le Père Piotr Roszak, théologien, collaborateur du projet, indique : « Souvent nous ne voyons pas ce qui est quotidien, et c’est pour cela qu’il faut l’ « extirper », pour le « rendre visible ». J’ai l’impression qu’il en est de même avec la représentation contemporaine de la croix dans l’art : même si elle est souvent sortie du cadre de l’histoire de la Passion, cela ne signifie pas qu’elle est coupée de la source du sens, car c’est seulement en lien avec elle, qu’elle possède une signification. Mais cet acte de « rendre visible » reste une tâche importante de l’art, qui « fait ressortir » du contexte quotidien ces choses, sans lesquelles tout s’effondre et perd sa saveur. »*

Bert STERN, Marilyn Monroe, Crucifix, 1962, impression numérique sur papier mat, 23 x 23 cm ©GALERIE ROI DORÉ

On la voit partout et pourtant, comme rarement, elle est rendue visible dans cette exposition « L’art de la croix.  La croix dans l’art ». Ne manquez pas de compléter votre visite par la lecture du catalogue (français-polonais), passionnant et richement illustré:

* Les textes en italique sont extraits du catalogue de l’exposition. Celui-ci est co-écrit par Piotr ROSZAK : prêtre, théologien, professeur à l’Université Nicolas Copernic à Torun et à l’Université de Navarre à Pampelune ; Magdalena Sawczuk : historienne de l’art, travaillant à la Galerie Roi Doré depuis début 2015 ; Marek Wittbrot : rédacteur, journaliste, essayiste et photographe. Auteur de nombreux textes dédiés à la littérature et à l’art contemporain. 

 

 

 

Informations pratiques

Exposition L’art de la croix.  La croix dans l’art
Jusqu’au 4 février 2017
Galerie Roi Doré

6 rue Sainte Anastase
75003 Paris
www.roidore.com
0142785442
Du mardi au vendredi de 12h à 19h, le samedi de 13h à 20h
Entrée libre

Stanislaw WOJCIKOWSKI, La croix de l'émigré, 1985, huile sur toile, 50 x 50 cm ©GALERIE ROI DORÉ
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