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George Desvallières, l’exaltation de la vie

Publié le : 18 Mars 2016
Il n’avait pas été exposé depuis 1937 ! Le Petit Palais remet (enfin) à l’honneur un des artistes phares de sa collection, qui bénéficiait d’ailleurs à l’époque d’une salle à son nom. Aujourd’hui et jusqu’au 17 juillet 2016, la première rétrospective dédiée à George Desvallières (1861-1950) redonne sa place à ce maillon artistique du Paris des années 1900 et de l’entre-deux-guerres. Les 90 peintures, dessins, vitraux et tapisseries, permettent d’appréhender sa production foisonnante et de suivre chronologiquement sur 60 ans, l’évolution de son art. Le thème choisi « Corps et âme » fait le lien entre la période profane et la peinture religieuse dans la carrière de l’artiste. Mais il résume surtout la charge émotionnelle que George Desvallières fait émerger de chaque figure, faisant de lui un des rares expressionnistes français.

Delaunay m’a donné le souci du dessin, mais Gustave Moreau, c’est le flambeau qu’il m’a transmis. »

Si l’itinéraire de Georges Desvallières est ponctué d’influences de ses amis Georges Rouault, Maurice Denis ou Gustave Moreau, il témoigne très tôt d’une indépendance artistique ancrée dans ses propres convictions. Placé sous le parrainage de Gustave Moreau, l’éveil de sa pratique est sensiblement imprégné du symbolisme de son maître. Il partage avec lui le goût pour le décor et pour les sujets allégoriques. Mais le jeune Georges Desvallières s’écarte rapidement de l’enseignement académique et montre une curiosité pour toutes les formes d’art.

Le traitement qu’il confère au corps est très différent de Gustave Moreau : une joie dans son rapport à la nature, inspirée de la Première Renaissance italienne ; une puissance issue des figures glorieuses de l’Antiquité ; une énergie physique influencée par les sculptures de Maillol, de Bourdelle ou de Rodin.

L’émergence de la photographie, permet à George Desvallières de mieux comprendre comment décomposer le mouvement. Le pastel devient sa technique de prédilection pour déployer les anatomies sur de grands formats : ce médium lui donne accès à la rapidité et à la souplesse du dessin ainsi qu’aux subtilités de la couleur. Il cherche ces mêmes qualités dans une peinture qu’il dilue pour se rapprocher de l’aquarelle. Il exprime, par la couleur et la matière, le plaisir de peindre et de la vie sous tous ses aspects.

Lorsqu’il s’engage en 1903 dans la création du Salon d’Automne au Petit Palais, c’est pour y présenter les expressions contemporaines les plus diverses et les plus novatrices. Vice-président du Salon et président de la section Peinture, ce peintre de la couleur défend les Fauves au Salon de 1905 face au déchainement de la critique. Au même moment, son style s’écarte du symbolisme de Moreau disparu en 1898, et évolue vers un naturalisme plus personnel.

George Desvallières, Hercule au jardin des Hespérides, 1913, Paris, musée d’Orsay, don de Mme Robert André et de Mme Couvreux-Rouché, en souvenir de leur père, Jacques Rouché, ami de l’artiste, 1958 - Photo © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) /Jean Schormans © Adagp, Paris 2016 

Dans le portrait de ses proches, le caractère du modèle transparaît dans les décors et les habits ; il saisit l’ambiance sur le vif, évoque le milieu social. Toujours avec l’audace et la légèreté de l’esquisse, il rend compte de la prostitution avec compassion. Il raconte la détresse qu’il perçoit et stigmatise un environnement.

En 1904, sa soudaine conversion à la foi chrétienne marque un tournant dans sa carrière. Ce retour au Credo guide désormais son existence et son œuvre : il peint de plus en plus de sujets religieux et mêle sa vie familiale aux représentations du sacré. Dans le Christ à la colonne présenté au Salon de 1910, le corps puissant et musculeux, marqué par les coups et les traces de sang, témoigne de son attachement à la peinture espagnole d’un Ribera et à l’expressionnisme allemand d’un Grünewald.

La peinture religieuse ne peut exister qu’en s’appuyant sur la nature, en creusant la nature, en arrachant au corps humain, à la figure humaine, sa ressemblance avec Dieu »

Sa quête spirituelle est attisée par l’expérience douloureuse et déterminante de la Première Guerre mondiale. Responsable d’une compagnie de chasseur sur le front des Vosges de 1914 à 1918, il fait la promesse de consacrer sa peinture à Dieu s’il s’en sort indemne. La paix revenue il accompli ce vœux en abandonnant définitivement les sujets profanes. Endeuillé par la mort de son jeune fils il laisse libre cours à son inspiration personnelle pour associer, dans une même célébration picturale, la Passion du Christ et le sacrifice du soldat mort pour la patrie.

George Desvallières, Christ à la colonne, 1910, Paris, musée d’Orsay Photo © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Martine Beck-Coppola © Adagp, Paris 2016 

Certes, il y a la croix, la croix toujours, mais aussi la résurrection, l’ascension, le ciel ».

Dans l’exposition un dispositif vidéo évoque les grands décors religieux et commémoratifs restés in situ. Notamment sa première réalisation à son retour de guerre : la chapelle du château de Saint-Privat, propriété de son mentor Jacques Rouché, et dans laquelle il fait le parallèle entre la Passion du Christ et le sacrifice du soldat qui meurt pour son pays. Ces commandes lui permettent de traduire, sur les murs des chapelles ardentes, la douleur du deuil engendrée par les combats, mais aussi son espoir spirituel en la rédemption. 

 

Dans L’Eglise douloureuse, restaurée à l’occasion de la rétrospective du Petit Palais, l’artiste emprunte les codes de l’iconographie chrétienne pour traduire un sujet allégorique. Dans cette peinture exposée au Salon des Tuileries en 1926, la croix du Christ s’élève devant l’immense tiare pontificale qui surgit d’une nuit étoilée.

L’enchevêtrement des corps et des croix ornées de la cocarde tricolore, dit toute l’horreur de cette mort de masse, à peine adoucie par les multiples séraphins qui ouvrent la scène vers le monde céleste. Au premier plan, le corps d’un soldat en uniforme bleu horizon, étendu bras écartés, vient en écho au Christ crucifié.

S’affirmant comme l’apôtre du renouveau de l’art sacré, il forme aux côtés de Maurice Denis, une jeune génération d’artistes chrétiens. Associés, avant la Première Guerre mondiale, dans la Société de Saint-Jean qui œuvrait pour la mise en lumière de la foi chrétienne par l’art, le doux Maurice Denis et l’impétueux Georges Desvallières fondent en 1919 les Ateliers d’Art sacré. Une sorte de corporation qui remet à l’honneur l’artisanat d’art et dont le programme cite Michel-Ange : « J’estime qu’il est nécessaire à l’artiste de mener une vie très chrétienne, ou même sainte s’il le pouvait, afin que le saint Esprit l’inspire ».

GEORGE DESVALLIÈRES, L’EGLISE DOULOUREUSE, 1926, PARIS, PETIT PALAIS © STÉPHANE PIERA / PETIT PALAIS / ROGER-VIOLLET © ADAGP, PARIS 2016

Mais paradoxalement, ces artistes « regroupés », qui souhaitent une renaissance des Arts Sacrés, ne reçoivent que très peu de commandes d’Eglise. Même à titre individuel, les décorations d’églises sont rarement adressées à un artiste comme Georges Desvallières. Sans doute l’Eglise craint-elle la passion de ce converti qui affirme que « le dogme chrétien est l’exaltation même de la vie » ?

Si je montre la vie je montre Dieu ».

L’exposition s’achève sur l’étude monumentale d’une fresque prévue pour le couvent des Clarisses de Mazamet (Tarn) où est entrée sa fille Sabine. La Vierge compatissante est le personnage central de la composition. Cette peinture glorieuse, éclatante, lumineuse, montre le rayonnement du sacré dans  son cheminement personnel et artistique. Elle traduit l’aisance avec laquelle, en fin connaisseur des codes de la peinture chrétienne, il s’en affranchit pour mieux exprimer sa foi. Enfin, elle rappelle que Desvallières, artiste singulier et toujours sincère, n’est pas le peintre du pathos, du tragique ; le peintre poursuit sa quête d’une beauté triomphante par-delà les épreuves. Pour redonner l’espérance. 

George Desvallières, La Fuite en Egypte, 1913 - Collection Catherine et Xavier de Bayser © Studio Sébert-Photographes © Adagp, Paris 2016

La visite se poursuit par une exposition-dossier dans les salles de la collection permanente, dédiée à la diversité des rencontres esthétiques qui, d’une génération à l’autre, ont accompagné l’évolution de l’artiste. Y sont notamment présentés, autour des dessins de George Desvallières, des études de Maurice Denis et des planches du Miserere de Georges Rouault.

Informations pratiques

George Desvallières, la peinture corps et âme
Du 15 mars au 17 juillet 2016
Au Petit Palais, Musée des Beaux-Art de la Ville de Paris
Avenue Winston Churchill – 75008

Du lundi au samedi de 10h à 18h
Nocturne le vendredi jusqu'à 21h

Tarifs
Plein tarif : 10 euros
Tarif réduit : 7 euros

Pour compléter l'exposition 
- Découverte de la chapelle Saint-Yves, Cité du souvenir (Paris 14e) peinte par Desvallières
Les mardis 12 avril, 10 mai, 14 juin à 16h30 et 17h15
Visites gratuites sur réservation auprès d’Isabelle Renaud-Chamska : isabelle.renaud-chamska@wanadoo.fr ou 06 85 11 70 73
Visites assurées par Isabelle Renaud-Chamska, historienne de l’art et théologienne, avec la participation de Jean-Baptiste Ambroselli - Plus d'informations ici 

- Découverte de l’église du Saint-Esprit (Paris 12e) et du Chemin de Croix, peint par George Desvallières
Les dimanches 17 avril, 22 mai et 19 juin à 16h et le jeudi 12 mai à 15h
Visites libres et gratuites assurée par les bénévoles de l’association Art, Culture et Foi

Retrouvez en cliquant sur ce lien toutes les informations sur les visites et conférences dédiées à Desvallières organisées par l'Association Art Culture et Foi.

Autour de l’exposition Cycle de conférences autour de George Desvallières, la peinture corps et âme.
"Corps glorieux, corps souffrants, au cœur de l'art de Desvallières"
En savoir plus ici.

"Maurice Denis et George Desvallières, une fraternité artistique et spirituelle"
En savoir plus ici.

"George Desvallières et la Grande Guerre"
En savoir plus ici.

Week-end danse au Petit Palais
A l’occasion de l’exposition George Desvallières, la peinture corps et âme, la Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Paris et le Petit Palais vous proposent un programme de performances dansées ...
En savoir plus ici.

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