Aller au contenu. | Aller à la navigation

Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

Bonjour, notre site va bénéficier d’une refonte dans les prochains mois. L’activité de Narthex est actuellement réduite. Nous vous remercions de votre compréhension.

Sienne, la grande rivale de Florence ! Des trésors s'exposent au musée de Rouen

Publié le : 3 Août 2015
Depuis l’exposition l’art gothique siennois tenue au musée du petit palais à Avignon en 1983, organisée en partenariat avec la Pinacothèque Nationale de Sienne, aucune rétrospective n’a été consacrée à la peinture siennoise des XIVe et XVe siècles en France. La Renaissance florentine, bien connue du public français constitue en revanche un thème fréquemment mis à l’honneur dans les musées français. La ville de Rouen a donc décidé de présenter au public, le « pendant » de l’art florentin que constitue la production de la grande cité rivale : la ville Sienne. Cette exposition, prévue à l’origine jusqu’au 17 août 2015 a été prolongée jusqu’au 7 septembre 2015 ! Une bonne raison de ne pas la rater !

Cette exposition permet ainsi au public d’admirer des chefs-d’œuvre qu’il a rarement l’occasion de voir réunis. Cette rétrospective propose de découvrir les spécificités de l’art siennois en donnant à voir des œuvres exécutées entre la fin du XIIIe siècle et la fin du XVe siècle. Cette présentation à la fois chronologique et thématique permet de comprendre comment, grâce à l’impulsion insufflée par Duccio, des artistes majeurs comme Simone Martini et les frères Lorenzetti ont véritablement révolutionné la peinture, à l’image de leur homologue Florentin, le fameux Giotto. Introduction de la notion de perspective, sensibilité nouvelle face au monde réel, attention portée à la variété des coloris, élégance des figures, développement du paysage, humanisation des épisodes sacrés sont autant de thèmes qui peuvent caractériser la peinture siennoise du XIVe siècle.

Dietsalvi di speme, la vierge à l'enfant en majesté entourée de deux anges (la vierge de saint bernardin), 1262, tempera sur panneau, 141,4 x 100 cm, siena, pinacoteca nazionale 

La peinture de Sienne au XIIIe siècle, les grandes thématiques d'un art marqué par la tradition

Au XIIIe siècle, la peinture à Sienne revêt un visage proche de celui qu’elle a ailleurs en Italie. En effet, avant que Giotto ne diffuse ses innovations dans différents centres d’Italie, la peinture est surtout marquée par la tradition orientale, c’est-à-dire byzantine. C’est principalement la notion de tradition qui est valorisée dans la création artistique. En effet, on considère alors que c’est en Orient que l’on a conservé les représentations les plus fidèles de la divinité.

Souvent rehaussées de pierres précieuses, d’or, de bijoux et de tissus luxueux, les images de la Vierge glorieuse intercédant auprès de son fils étaient particulièrement vénérées et réputées pour les miracles qu’elles accomplissaient. La reconstitution dans la deuxième salle du parcours du retable de la Badia Ardenga de Montalcino, exécuté selon toute vraisemblance de la main de deux artistes, Guido de Siena et Dietisalvi di Speme, permet d’apprécier les innovations introduites par les peintres siennois dans l’art de la narration. Les scènes représentées illustrent le cycle de la Passion avec une vitalité nouvelle et un souci de véracité qui entraîne le spectateur au cœur du récit et rompt peu à peu avec la tradition.

La multiplication des commandes, la richesse des commanditaires, l’évolution des pratiques de dévotion, des contextes économiques et politiques ainsi que la présence de jeunes artistes sensibles à ces préoccupations nouvelles ont ouvert la voie à la fin du XIIIe et au début du XIVe siècle à de nouvelles recherches qui devaient donner naissance à l’art siennois tel qu’on le connaît de nos jours.

A gauche : Simone Martini, La Vierge à l’Enfant, 1300-1310 Tempera sur panneau, 74,5 x 57 cm Siena, Pinacoteca Nazionale
A droite : Ambrogio Lorenzetti, La Vierge à l’Enfant, c. 1340, Tempera sur panneau, 108,5 x 62,5 cm, Siena, Pinacoteca Nazionale

Les artisans de la révolution picturale à Sienne : de Duccio aux frères Lorenzetti

Cette section se propose de présenter le remarquable élan créateur, initié par Duccio, qui a animé les peintres de la fin du XIIIe et du début du XIVe siècle à Sienne, notamment autour de trois grandes figures : Simone Martini, Pietro et Ambrogio Lorenzetti. C’est à cette période que la peinture Occidentale connaît de profondes mutations. Désormais, c’est l’invention qui contribue à la renommée des peintres. De nouvelles formes de dévotion introduites par les ordres mendiants donnent une image plus humanisée du divin. Si les trois grands thèmes de la vie du Christ, de la Vierge et des saints perdurent, ils se chargent d’une émotion nouvelle : pathos, tendresse, empathie sont autant de sentiments que les peintres cherchent à transmettre. C’est également à cette période que s’opère une confusion volontaire entre le monde profane et le monde sacré : des personnages réels n’hésitent pas à se mettre en scène dans des événements sacrés, comme le donateur qui se fait représenter agenouillé aux pieds de la Vierge et du Christ et les saints. Le début du XIVe siècle coïncide aussi avec l’invention de nouvelles iconographies, plus adaptées aux pratiques des fidèles, qui illustrent les miracles de nombreux saints locaux.

Enfin, c’est à cette époque que naît à Sienne la grande peinture allégorique, à l’initiative d’Ambrogio Lorenzetti. C’est à Sienne que l’art civique, au service de la gloire de la cité, connaît un essor particulier. En somme, les artistes se sont fait l’écho des évolutions religieuses, politiques et culturelles de cette période foisonnante que constitue le début du XIVe siècle, mobilisant leur invention pour créer des images d’une grande originalité.


FOCUS

Gano di Fazio, Scènes de la vie du bienheureux Gioacchino, ‘Piccolomini’, c. 1310-1312, Marbre, 45 x 170 cm. Siena, Pinacoteca Nazionale

Ce bas-relief devait faire partie du monument funéraire de Joachim Piccolomini, un bienheureux siennois décédé en 1304, dont la vie est évoquée par trois scènes miraculeuses. La première illustre son entrée au couvent dont la porte s’ouvre d’elle-même. Dans la seconde, il est frappé d’une crise d’épilepsie et heurte une table sans rien renverser ni casser. La dernière scène évoque le miracle d’un cierge qui brûle sans se consumer et reste droit tandis que Joachim est de nouveau frappé d’une crise d’épilepsie. Véritable nature morte, les objets de la table renversée montrent un sens du concret plus que du symbolique. Les sobres attitudes des figures, la simplicité des drapés incisifs, la révélation des corps sous-jacents refusent les complexités virtuoses de la sculpture gothique. Cet esprit classique continue la tradition de ses prédécesseurs Arnolfo di Cambio et Nicola Pisano. Artiste mal connu, Gano di Fazio fait partie des novateurs préfigurant la Renaissance.


La seconde moitié du XIVe siècle à Sienne : la poursuite des expériences et des inventions du début du siècle

En dépit du choc de la peste noire qui s’abat sur Sienne pendant l’été 1348 et provoque la mort de nombreux peintres, parmi lesquels les frères Lorenzetti, les artistes siennois de la deuxième moitié du XIVe siècle ont su trouver les ressources suffisantes pour renouer avec les expériences artistiques de leurs aînés. Les commanditaires, certes moins nombreux qu’auparavant, ont toutefois continué à passer commande de petits diptyques et triptyques de dévotion privée, de grands tableaux d’autels, et de peintures à fresques destinées à orner les églises de la ville. Les artistes ont perpétué la tradition qui venait de se mettre en place, et ont donné de nouvelles orientations à la peinture siennoise. À la fin du XIVe et au début du XVe siècle, force est de constater que les artistes siennois continuent de perpétuer les types et les modes qui ont fait le succès de l’art siennois tout au long du XIVe siècle. Admiratifs de la leçon de leurs aînés, ils ne parviennent cependant pas à la même perfection technique, et peu d’entre eux proposent de nouveaux modes de représentation.

Dans la dernière décennie du XIVe siècle, Paolo di Giovanni Fei s’illustre en produisant de petits diptyques où la Vierge porte un manteau brodé d’or, dont il parvient à rendre la somptuosité au moyen de la technique du sgrafitto, qui consistait à peindre sur l’or, puis à retirer la peinture pour faire apparaître ces motifs décoratifs éclatant en réserve, le tout prenant place dans un cadre souligné par un réseau de motifs décoratifs poinçonnés, faisant de ces œuvres de petits bijoux aussi précieux qu’une pièce d’orfèvrerie.

Paolo di Giovanni Fei, Diptyque de l’Observance, La Vierge à l’Enfant en majesté, sainte Catherine d’Alexandrie et sainte Agnès, entourées de deux anges (à gauche) ; La Crucifixion avec la Vierge, saint Jean l’Évangéliste et les saintes femmes (à droite) ; L’ange de l’Annonciation (pinacle de gauche) ; La Vierge de l’Annonciation (pinacle de droite), 1390-1395 Tempera sur panneau, 53,9 x 48,7 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

Certains artistes originaires d’autres villes ont tenté de venir travailler dans la cité, mais rares sont ceux qui s’y sont imposés, la cité étant réticente à accueillir des peintres venus de villes rivales. Quelques-uns, comme Cennino Cennini ou Spinello Aretino, ont néanmoins su s’adapter aux spécificités du contexte siennois, adoptant parfois même une esthétique s’inscrivant dans la lignée de la mode précieuse et raffinée que Simone Martini et son atelier avaient répandue à Sienne plusieurs décennies auparavant, et qui était toujours en vogue à la fin du Trecento.


FOCUS

Cennino Cennini, La Nativité de la Vierge, 1390-1400 Tempera sur panneau, 86 x 67 cm Siena, Pinacoteca Nazionale / en dépôt temporaire à Colle di Val d’Elsa. 

La naissance de la Vierge est rarement représentée avant le XIVe siècle. Les Évangiles ne faisant pas mention de Marie avant l’épisode de l’Annonciation, le récit de son enfance est emprunté à la Légende dorée. La nativité mariale de Cennini est décrite avec fantaisie et sous un mode profane telle une scène de genre avant la lettre. Dans un esprit siennois, le sens du détail, du concret et le ton de l’anecdote provoquent une aimable fusion poétique entre mondes spirituel et terrestre. Dans une chambre bourgeoise décrite avec soin à travers son mobilier et ses objets, une matrone joue avec Marie, une domestique vérifie la chaleur d’un bain ; au-dessus du muret deux curieux observent la scène. L’artiste se revendique comme héritier de Giotto, il en retient les formes simplifiées mais en rejette la cohérence spatiale ni l’idéal d’équilibre. Il est l’auteur du Livre de l’art. Ce traité est l’un des plus anciens ouvrages sur les techniques picturales autour de 1400. On y trouve l’une des toutes premières affirmations de la peinture comme art et non comme artisanat.


Giovanni Di Paolo, l’invention d’un nouveau langage pictural au XVe siècle

Si au tournant du siècle les peintres siennois ont continué à perpétuer l’art des grands maîtres du début du Trecento, c’est un nouveau langage qui se met en place à Sienne à partir des années 1420 à l’initiative de peintres comme Stefano di Giovanni, dit Sassetta, Giovanni di Paolo, le Maître de l’Observance ou de sculpteurs tel Jacopo della Quercia. Encore fidèles dans une certaine mesure à l’esthétique du Trecento, ils expérimentent des recherches tout à fait nouvelles. Giovanni di Paolo est également un artiste qui a contribué à renouveler le langage artistique à Sienne, d’une manière toutefois différente. Il s’agit d’un peintre étonnant dont l’activité court sur presque tout le XVe siècle. Il s’inspire tant des artistes du siècle précédent, que de ses contemporains les plus novateurs, Sassetta à Sienne, mais aussi Gentile da Fabriano, Fra Angelico, ou même Donatello à Florence. Il développe un langage artistique profondément singulier, peuplant ses œuvres de figures qui semblent héritées de l’art du Trecento ou des expériences du gothique international, mais réinterprétées dans un style graphique, parfois étrange, tout à fait propre à l’artiste. Il manifeste en même temps un intérêt pour le paysage, dont il donne une interprétation bien éloignée des préoccupations de ses contemporains florentins : loin de la perspective mathématique et illusionniste, il juxtapose audacieusement des éléments au mépris du respect des échelles.


FOCUS

Giovanni di Paolo, La Vierge de l’Humilité, c. 1450 Tempera sur panneau (avec encadrement d’origine), 62,4 x 47,8 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

La Vierge est valorisée dans la spiritualité et la création gothique, notamment dans la cité de Sienne dont elle est la protectrice. Giovanni de Paolo la représente selon la formule de la Vierge de l’humilité, assise sur le sol. Inventée par le Siennois Simone Martini au milieu du XIVe siècle, cette iconographie dénuée de solennité vise à humaniser le monde divin. Le verger et les fleurs qui entourent la Vierge renvoient au thème de l’hortus conclusus, ce jardin clos symbolique de sa pureté et de ses vertus. L’oeuvre concilie avec grâce les idéaux de la Renaissance et l’esprit gothique. Si le fond d’or a disparu, le paysage sur un plan incliné est dans un point de vue différent du premier plan refusant l’unité spatiale recherchée par les artistes de Florence. La description précise renvoie tant à l’art de l’enluminure qu’à l’observation de la réalité. Les images oniriques et idéalistes de Giovanni di Paolo appartiennent à une culture gothique, courtoise et siennoise, faite d’élégance, de fantaisie et de belles lignes sinueuses. Il est avec Sassetta un des artistes majeurs de son temps.


 

Francesco di Valdambrino, L’Enfant Jésus bénissant, c. 1403-1409 Bois sculpté, peint et doré, h 41 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

Sano Di Pietro : une production standardisée, adaptée aux pratiques dévotionnelles des siennois ?

Sano di Pietro est l’un des artistes les plus prolifiques de la Sienne du XVe siècle. À la tête d’un atelier important, il agit en véritable entrepreneur fournissant à une clientèle nombreuse des œuvres de dévotion privée reproduisant des types particulièrement prisés. Il a ainsi peint de nombreuses Vierge à mi-corps portant l’Enfant, destinées à venir prendre place dans des chapelles privées, ou à être offertes à des églises. Les personnages récemment canonisés comme Catherine de Sienne ont connu une faveur particulière auprès des fidèles et ont rapidement pris place dans les œuvres de Sano di Pietro. En réunissant un nombre important d’oeuvres de cet artiste, le public pourra apprécier la manière dont il a su s’imposer comme un artiste incontournable à Sienne au XVe siècle et comme un fin commerçant, sachant tirer profit d’un type de production qu’il vendait à coup sûr et qui a fait son succès !

A gauche : Sano di Pietro, Sainte Catherine de Sienne, c. 1470 Tempera sur panneau, 41 x 16,5 cm Siena, Pinacoteca Nazionale
A droite : Sano di Pietro, L’Assomption de la Vierge avec anges musiciens, c. 1430-1440 Tempera sur panneau (avec encadrement d’origine), 70,5 x 52,5 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

Sassetta, peintre de la transition

Bien que formé dans la tradition gothique et fortement influencé par l’œuvre des frères Lorenzetti, Sassetta manifeste un intérêt tout à fait nouveau pour la perspective et pour le rendu des volumes. Les expériences qu’il mène en termes de composition sont les premiers signes de l’incursion de l’art florentin dans la peinture siennoise et placent ses œuvres à la transition des styles gothique et Renaissance. Il propose à chaque fois une interprétation différente du sujet, jouant sur la position des personnages pour donner l’illusion de la profondeur et du mouvement. À des recherches formelles nouvelles, se mêlent à la fois poésie, sens de la nature, du paysage et des effets atmosphériques, qui font que ses œuvres comptent parmi les chefs-d’œuvre de l’art Occidental.

Stefano di Giovanni dit « Il Sassetta », L’Institution de l’Eucharistie, 1424 Panneau de la prédelle du retable de la Arte della Lana Tempera sur panneau, 24.1 x 38,1 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

La seconde moitié du XVe siècle à Sienne : entre tradition et renaissance ?

On a longtemps fait de l’art siennois un art hermétique aux expériences menées dans d’autres centres artistiques en Italie. Mais en réalité, les voyages d’artistes ont favorisé de véritables échanges. Francesco di Giorgio Martini, de même que Benvenuto di Giovanni ou Guidoccio Cozzarelli, marqués par l’art de leurs contemporains florentins, notamment Donatello, ont largement contribué au renouveau du langage artistique à Sienne dans la deuxième moitié du XVe siècle. L’exposition se propose de présenter plusieurs œuvres, mettant notamment en scène des sujets à l’antique qui témoignent de l‘intérêt nouveau des artistes et des commanditaires siennois pour la redécouverte de l’Antiquité classique. Parallèlement, les peintres continuent à produire des œuvres plus traditionnelles, illustrant des miracles de saints locaux.

 

Francesco di Giorgio Martini, Suzanne et les vieillards, c. 1460 Tempera et or sur panneau, 29,5 x 39,8 cm Siena, Pinacoteca Nazionale

Découvrez l'exposition en vidéo !

Reportage : Béatrice Rabelle -  Jérôme Bègue- Philippe Taddeï- Pierre Léonard

 

Informations pratiques : 

Sienne aux origines de la Renaissance

21 mars au 7 septembre 2015

MUSÉE DES BEAUXARTS
Esplanade Marcel Duchamp
76000 Rouen
Tél. : +33 (0)2 35 71 28 40
Fax : +33 (0)2 35 15 43 23

Horaires d'ouverture :

De 10 heures à 18 heures
tous les jours
Fermé les mardis et le 1er mai
Tarif plein : 9 €
Tarif réduit : 6 €
Entrée gratuite pour les moins de 26 ans et les demandeurs
d’emploi

Renseignements et réservations : 

Site officiel : Musée des Beaux-arts de Rouen

Tel : (0)2 35 71 28 40

Mail : musees@rouen.fr

 

 

 

Recherchez sur le site
Inscrivez-vous à la newsletter
A ne pas manquer Voir tout l’agenda