La peinture de Nicolas Poussin au Louvre, reflet d'une «tranquillité de l’âme»
Publié le : 16 Avril 2015
L’exposition réunit les plus belles compositions sacrées de Poussin venues du monde entier autour de 40 toiles, dessins et estampes issus des collections du musée du Louvre. Toutes ont pour fil conducteur la passion de Nicolas Poussin pour l’Antique. L’artiste joue entre deux mondes : l’héritage antique s’harmonise avec la tradition chrétienne. Il revendique avec une grande liberté la possibilité de réinventer continuellement les représentations des sujets profanes pour proposer une double lecture. Ainsi, si dans les premières salles de l’exposition les grands retables extériorisent avec évidence la spiritualité de Nicolas Poussin, les dernières, dédiées à l’art du paysage et aux scènes plus intimes, reflètent avec subtilité l’omniprésente question du sacré dans le parcours du peintre.
Le parcours met également en évidence la singularité de Poussin dans la Rome baroque d’après le concile de Trente. Alors que l’art se met au service de la reconquête des âmes face aux protestants, Nicolas Poussin participe activement au mouvement, en témoigne la sublime Assomption, peinte vers 1629.
Cependant l’artiste qui peint à Rome pour des commanditaires majoritairement français, se tient à l’écart des artistes officiels de la Rome papale. Il peint seul, sans collaborateurs et sans élèves, suivant une ligne plus singulière que ses contemporains, aussi bien par le choix de ses sujets que par la manière de les traiter. Son art évolue vers un style plus abstrait, plus distancié, où le divin est le plus souvent seulement suggéré.
L’ensemble de l’œuvre de Nicolas Poussin laisse apparaître une synthèse nouvelle des traditions chrétiennes et antique. Il s’appuie sur la relation qu’il établit entre la Fortune, dans la tradition antique, et la Providence chrétienne. Les péripéties de la vie, les tribulations du monde terrestre, les instants tragiques où se jouent les destinées humaines, les revers de fortune sont autant de thèmes récurrents sous le pinceau de Poussin. Dans son Moïse exposé sur les eaux, l’artiste dispose les personnages avec le plus grand soin pour exprimer toute l’intensité du drame qui se joue mais annonce déjà l’intervention de la Providence divine.
Dans l’épisode peint d’Eliezer et Rebecca, Poussin représente une sphère de pierre que porte un pilier aux formes massives, symbole de la providence divine : traduisant que Rebecca n’est autre que la Vierge Marie visitée l’Archange Gabriel. La main droite de Rebecca posée sur son cœur évoque le signe d’acceptation de Marie lors de l’Annonciation.
A compter de la fin des années 1640 et jusqu’à sa mort en 1665, l’artiste développe de vastes compositions où la nature se fait l’écrin sublime des actions humaines, miroir de l’ordre du monde. Le cycle des Quatre Saisons, achevé un an avant la mort de l’artiste, restitue avec une intensité dramatique sans précédent, la puissance des forces de la nature et la fragilité du genre humain. Le traitement du sujet est tout à fait nouveau : chaque saison est associée à un épisode de l’Ancien Testament et seule une lecture chrétienne permet de percer le mystère du choix des sujets. La figure cachée du Christ constitue le lien secret qui unit les quatre compositions. Maîtrise absolue des moyens d’expressions du peintre parvenu au sommet de son art.
La scénographie de l'exposition s’est adaptée au formidable coloriste qu’était Nicolas Poussin : comme elles l’étaient à l’époque de leur réalisation, les toiles sont exposées sur des murs de couleurs profondes et vives afin de mettre en valeur toute l’intensité des couleurs des compositions. Un travail sur les cadres des tableaux a également été effectué en écho à la pensée du peintre pour qui le cadre avait pour mission de séparer l’œuvre du reste du monde. La sobriété des cadres a ainsi été choisie afin de concentrer le regard sur l’image.
En abordant l’art de Poussin avec des œuvres parmi les plus émouvantes et témoins d’une méditation personnelle sur Dieu, l’exposition donne tort aux a priori considérant le « Peintre poète » comme un artiste que seuls les « gens d’esprit » peuvent comprendre. En conciliant avec poésie les traditions sacrées et profanes, Nicolas Poussin réalise une synthèse d’une originalité et d’une puissance d’inspirations exceptionnelles.
Informations pratiques
Poussin et Dieu
Du 2 avril au 29 juin 2015
Lieu : Musée du Louvre, 75058 Paris - France
Hall Napoléon, sous la pyramide
Tarifs sur place :
Billet spécifique aux expositions du Hall Napoléon : 13€.
Billet jumelé (collections permanentes et exposition) : 16€.
Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9 h à 18 h. Nocturnes les mercredi et vendredi jusqu’à 21h45.
Renseignements et autour de l’exposition
01 40 20 53 17
www.louvre.fr/expositions/poussin-et-dieu