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Elévation à Venise - point de vue sur la 57e expo internationale d'art [1/2]

Publié le : 9 Octobre 2017
Les Biennales d’art contemporain prolifèrent dans le monde entier. En France, celle de Lyon ouvre les portes de sa 14ème édition, « Mondes flottants » jusqu’au 7 janvier 2018, nous vous en parlerons prochainement. Prenons déjà le temps d’un regard sur la 57ème exposition internationale d’art, dite « La Biennale de Venise » : Vive arte viva ! (jusqu’au 26 novembre 2017) sous la direction de la française Christine Macel. Point de vue du Père Michel Brière.

Pavillon italien, Giorgio Andreotta Calò, sans titre (La fine del mondo), 2017 © photo : Roberto Marossi

Honneur à l’hôte. Entrons dans le pavillon italien. De dimensions imposantes et traditionnellement situé non dans les Giardini mais au bout de l’Arsenale. Cecilia Alemani, première femme à en être commissaire, y propose sous le titre : « Il mondo magico » trois œuvres de grandes tailles. Signées Adelita Husni-Bey, Giorgio Andreotta Calò et Roberto Cuoghi. Les deux dernières interrogent clairement la relation que les chrétiens peuvent entretenir avec la création contemporaine.  La question du corps – ce n’est pas un hasard – y tient la position centrale. A ma gauche, sans titre (La fine del mondo) 2017, de l’artiste vénitien Giorgio Andreotta Calò. A ma droite, Imitazione di Cristo, 2017, du milanais Roberto Cuoghi. Non seulement leurs titres mais l’investissement des deux espaces séparent nettement les deux projets.

La fine del mondo

Giorgio Andreotta Calò inscrit son œuvre dans l’architecture même de l’Arsenal. Dans la pénombre, de simples étais d’échafaudage soutiennent avec une régularité géométrique un plafond de bois. Quelques sculptures sont regroupées dans la lumière du jour que diffuse une sorte de soupirail. Evocations d’entités mi-végétales, mi-animales, elles s’accrochent aux étais comme des moules à leurs bouchots. La nudité du lieu désoriente. Le plafond relativement bas limite toute association à la structure sereine d’une architecture religieuse. Pourtant, l’espace achemine le regard vers un escalier qui occupe toute la largeur d’une extrémité et permet de monter à l’étage. Etrange ascension à seule fin de faire voir. La partie supérieure n’est que visible. Immense, et d’une immensité symétrique baignée d’une douce lumière. Il me faut un peu de temps pour analyser mon impression. Moment fort où la sensation enchante.

idem, sculptures suspendues, 2017 

PAVILLON ITALIEN, GIORGIO ANDREOTTA CALÒ, SANS TITRE (LA FINE DEL MONDO), 2017 © PHOTO : ROBERTO MAROSSI

Puis, je crois comprendre qu’un film poli miroir recouvre la totalité du sol et reflète parfaitement la charpente et le toit. L’effet produit parait inversement proportionnel à la simplicité du procédé. Spectaculaire, certes, mais propice à la contemplation silencieuse. Le plancher divise réellement le volume, le miroir en multiplie la vision. Une vision dont la symétrie ne se modifie qu’au rythme de mes déplacements sur les dernières marches du vaste escalier. C’est bien le corps du spectateur, appelé à éprouver cette intervention dans le lieu, qui prend une place prépondérante. En quittant l’agonie d’un monde déserté où il se déplace, pour ne pas dire qu’il y gesticule, et s’élever à la vision d’un ordre nouveau, apaisé par une dualité sans duplicité. Où tout est « sur la terre comme au ciel ».

Imitazione di Cristo

Pavillon italien, Roberto Cuoghi, Imitazione di Cristo, 2017 © PHOTO : Michel Brière

Roberto Cuoghi a construit une grande infrastructure de plastique translucide, à la manière d’un hôpital de campagne - ou d’une usine d’anticipation. L’impression de provisoire évoque l’urgence à proximité d'une zone de combat. Des cellules bordent un couloir qui conduit au foyer de l’entreprise. Chacune expose sur tables des corps d’hommes nus réalisés en divers matériaux. Ici, on fabrique des idoles qui toutes ressemblent à des martyrs. La position des bras suggère le supplice de la croix. En s’appropriant à la lettre le titre de l’œuvre de Thomas a Kempis : « L’imitation du Christ » l’œuvre exhibe ad nauseam la vanité d’une imitation « clonesque ». A la lettre, tout peut devenir idole, même Celui qui les détruit. « La lettre tue, c’est l’Esprit qui vivifie » (2Cor. 3,6).

PAVILLON ITALIEN, ROBERTO CUOGHI, IMITAZIONE DI CRISTO, 2017

Ainsi, je me méfie des représentations explicites et saturées. Les symboles, souvent réduits à des signaux, paraissent aussi subtils que des panneaux routiers. Convaincre réduit l’art à l’expression, pire à de la propagande. De même, quand une œuvre d’art se contente de dénoncer quoi que ce soit elle ne tarde guère à succomber sous le poids de ce qu’elle prétend stigmatiser. J’ai donc préféré, on l’aura compris, la proposition très ouverte, c’est-à-dire « poétique » de Giorgio Andreotta Calò. Mieux, elle m’a permis de remarquer quelques autres qui, chacune à leur manière, scindent leur espace en deux parties superposées et même tendent à élever physiquement le regard en même temps que la réflexion. [à suivre...]

 

La suite de la visite du père Brière à la Biennale de Venise en cliquant ici !

 

Père Michel Brière

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