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Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

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Issues de France et d'Italie, le Louvre-Lens présente des merveilles d'or et d'ivoire

Publié le : 7 Juillet 2015
L’exposition de l’été 2015 au Louvre-Lens met en lumière la richesse des échanges artistiques entre la capitale du royaume de France et l’actuelle Toscane dans la seconde moitié du 13e siècle et au début du suivant. Grâce aux prêts exceptionnels d’une vingtaine de prestigieux musées européens, elle lève le voile sur les relations entre les grands foyers de création artistique que sont à l’époque Paris d’un côté, Florence, Sienne et Pise de l’autre. Statuaire monumentale, peintures à fond d’or mais aussi manuscrits enluminés, émaux et ivoires précieux : plus de 125 oeuvres d’un grand raffinement sont ainsi rassemblées. Elles révèlent en particulier l’influence exercée par les représentants parisiens du gothique rayonnant sur les sculpteurs et peintres toscans de la fin du 13e siècle, dans une aire culturelle qui deviendra le berceau de la Première Renaissance.

© Ville de Lens / Laurent Lamacz

© Ville de Lens / Laurent Lamacz

Bien que très courte, la période concernée par l’exposition (1250-1320) est marquée par des évolutions décisives en Europe, tant sur le plan politique, économique et social qu’intellectuel et artistique. Les arts connaissent d’importantes innovations technologiques mais aussi l’émergence de très grandes personnalités. Progressivement, les créateurs ne sont plus simplement considérés comme des artisans au service de l’Église mais comme des artistes oeuvrant pour la société. La seconde moitié du 13e siècle occupe donc ainsi une place à part dans l’histoire de l’art. 

MAÎTRE DU CODEX DE SAINT GEORGES, Éléments de diptyque : Noli me tangere (a), Couronnement de la Vierge (b), Florence, vers 1320, tempera sur bois, Florence, Museo Nazionale del Bargello © S.S.P.S.A.E e per il Polo Museale della città di Firenze - Gabinetto Fotografico

Avec ses grands chantiers architecturaux comme la Sainte-Chapelle, la chapelle de la Vierge de Saint-Germain-des-Prés, et la stabilisation de la cour au Palais de la Cité, Paris devient la « capitale du luxe ». S’y développe ainsi une abondante production d’objets précieux (manuscrits enluminés, ivoires, orfèvrerie), soutenue par la multiplication des commandes artistiques de la part des dignitaires. Paris est alors le coeur de ce que l’on nomme aujourd’hui le gothique rayonnant.


FOCUS

La Descente de croix Paris, vers 1270-1280, Ivoire, polychromie, Paris, musée du Louvre

Récemment reconstitué, ce groupe de Déposition est l’un des chefs-d’oeuvre de l’ivoirerie parisienne. Très proches stylistiquement de la sculpture monumentale, ces petits groupes en ivoire sculpté ont joué un rôle fondamental dans la diffusion du style parisien en Europe. Ici, le sens du mouvement et les drapés creusés sont particulièrement remarquables.

© MUSÉE DU LOUVRE, DIST. RMN-GP / MARTINE BECK-COPPOLA

 

De l’autre côté des Alpes, l’art toscan porte en germe le style de la Première Renaissance. Dans la lignée d’artistes tels que Cimabue et Nicola Pisano, peintres et sculpteurs s’écartent des traditions byzantinisantes au profit d’un nouveau langage, caractérisé par un renouveau du regard sur l’Antiquité et une prise en considération de la Nature. Si ces évolutions se développent d’abord en Toscane, elles puisent probablement leurs racines dans les nouvelles références philosophiques, théologiques, mathématiques ou littéraires diffusées au sein de l’Université de Paris. L’histoire de l’art a souvent souligné combien l’art gothique a pu évoluer au contact de l’art de la Première Renaissance.


FOCUS

Vierge et saint Jean pleurant ; Christ de Déposition, Prato, vers 1250, Bois (peuplier ; noyer), polychromie tardive, Paris, Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge (Vierge et saint Jean), Prato, Duomo (Christ) 

Les groupes de déposition en bois sculpté sont nombreux en Italie centrale au 13e siècle. Les trois figures, issues de la cathédrale de Prato, sont rassemblées pour la première fois depuis le 19e siècle. Leur parenté stylistique apparaît notamment dans les plis métalliques simples, très éloignés du gothique français contemporain. La polychromie de la Vierge et de saint Jean date du début du 14e siècle quand celle du Christ est plus tardive.

© RMN-GP (musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge) / Gérard Blot et Michel Urtado
© 2015. Photo Scala, Florence

 

Paris et la Toscane, histoire artistique croisée 

Entre le milieu du 13e siècle et les premières décennies du siècle suivant, une évolution des formes artistiques s’est opérée en Toscane, notamment dans le domaine de la sculpture monumentale, sous l’impulsion de Nicola Pisano et de son atelier. On a vu dans cette mutation artistique l’expression d’une proto-renaissance, annonçant la Renaissance qui débute au 15e siècle et clôt la période médiévale en Italie. L’exposition présentée au Louvre-Lens donne à voir ces nouvelles formes de l’art toscan et examine l’une de ses influences majeures : l’art parisien contemporain. Les transferts formels de l’art parisien sur l’art toscan se perçoivent essentiellement dans le domaine de la sculpture monumentale et dans celui de l’orfèvrerie, ces productions étant liées aux grands chantiers de l’époque et à la constitution des trésors d’église.


FOCUS

Reliquaire des saints Lucien, Maxien et Julien Paris, Sainte-Chapelle, vers 1261, Argent gravé, ciselé, doré Paris, Musée de Cluny - musée national du Moyen Âge.

Seul reliquaire du trésor de la Sainte-Chapelle du temps de saint Louis parvenu jusqu’à nous, il est consacré à trois saints de Beauvais, gravés sur l’une des faces, tandis que des ouvertures, de l’autre côté, permettent de contempler les reliques qu’il contient. Sa forme d’église est caractéristique de l’influence de l’architecture sur les autres arts au milieu du 13e siècle.

© RMN-GP (musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge) / Michel Urtado

 

Entre 1250 et 1320, les spécificités politiques, économiques et commerciales de Paris et de la Toscane, conjuguées à l’émergence de personnalités artistiques majeures favorisent les transferts entre l’art rayonnant développé à Paris et l’art innovant qui émerge alors à Pise, Sienne et Florence. Cette assimilation de l’art parisien a été observée dans la sculpture italienne mais il ne s’agit pas de copie littérale mais bien d’inspirations formelles dans les systèmes des drapés ou les iconographies. Les études d’ensembles d’oeuvres, dans les domaines de l’orfèvrerie, de l’ivoire ou de l’art de la miniature, ont également permis de mettre en lumière les échanges de technologie et les assimilations stylistiques. 


FOCUS

Atelier de Nicola Pisano, Groupe de trois apôtres, Pise, vers 1270, Marbre, Londres, Victoria and Albert Museum.

Les trois apôtres auteurs de lettres, appelées épîtres, lues pendant la messe,, sont ici représentés : saint Paul au centre est entouré de saint Pierre (à sa, droite) et de saint Jacques le Majeur (à sa gauche). Ce groupe est probablement, issu d’une chaire perdue, réalisée par Nicola Pisano et son atelier. Si les visages, et les costumes sont d’inspiration antique, le traitement des manteaux semble, directement inspiré des ivoires parisiens contemporains.

© Victoria and Albert Museum, London

 

On est alors poussé à s’interroger sur les modalités de ces transferts artistiques. Ils ont pu s’effectuer par différents biais et en premier lieu par la circulation d’objets, allant des reliquaires aux statues de dévotion, en passant par les manuscrits. Les transferts de technologie ont pu s’opérer par l’observation directe, puisque les ivoires et les émaux circulaient aisément au point d’être parfois réintégrés dans des oeuvres toscanes.

Bien entendu, ces transferts formels et culturels n’aboutissent qu’à une réappropriation partielle de l’art parisien en Toscane. 

A gauche : MAÎTRE DE CITTÀ DI CASTELLO, Crucifixion, Sienne, vers 1310-1320, tempera sur panneau de bois, Manchester, Manchester City Galleries (collection Crawford et Balcares) © Manchester Art Gallery, UK / Bridgeman Images
En haut à droite : Samson et le Lion, Paris, Sainte-Chapelle, 1241-1248, vitrail, Paris, Musée de Cluny - Musée national du Moyen Âge © RMN-GP (musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge) / Franck Raux
En bas à droite : CHILDEBERT RECEVANT SAINT GERMAIN, PARIS, SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS, CHAPELLE DE LA VIERGE, VERS 1240-1245, VITRAIL, LONDRES, VICTORIA AND ALBERT MUSEUM © VICTORIA AND ALBERT MUSEUM, LONDON

Le parcours de l'exposition 

En guise d’introduction à la visite, l’exposition présente une copie de la statue de la Vierge à l’Enfant du bras nord du transept de Notre-Dame de Paris. Ce plâtre du 19e siècle a été restauré en avril 2015 dans l’atelier visible et visitable du Louvre-Lens. L’original est la seule sculpture de trumeau médiévale encore en place à la cathédrale. Oeuvre de Jean de Chelles, avant 1258, sa souplesse et son élégance, son drapé à la fois simple et recherché ont inspiré les ivoiriers parisiens de la deuxième moitié du 13e siècle et, peut-être à travers eux, de nombreux artistes en Europe, notamment en Toscane.

Moulage en plâtre de la Vierge du bras nord du transept de Notre-Dame de Paris, Paris, milieu du 19e siècle © photo Charles-Hilaire Valentin

La première section de l’exposition dresse un rapide panorama de la naissance du gothique rayonnant à travers quatre grands chantiers architecturaux parisiens : la chapelle de la Vierge de Saint-Germain-des-Prés, la Sainte-Chapelle au Palais de la Cité, les bras du transept et la clôture du choeur de Notre-Dame. Eléments d’architecture et statuaire monumentale sont accompagnés de manuscrits royaux et de vitraux provenant des mêmes chantiers. Face à eux sont présentées des peintures et des sculptures toscanes du deuxième tiers du 13e siècle, encore influencées par l’art byzantin.

Jean DE CHELLES, Tête de Roi mage, Paris, cathédrale Notre-Dame, 1250-1258, calcaire, traces de polychromie, Paris, Musée de Cluny - Musée national du Moyen Âge © RMN-GP (musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge) / Franck Raux

La deuxième salle de l’exposition se concentre sur une nouvelle génération d’artistes qui ont transformé les pratiques des artisans. Cette section de l’exposition se concentre principalement sur l’œuvre de Nicola Pisano et montre comment se forme le style de l’art toscan dans la seconde moitié du XIIIe siècle, entre renouveau de la tradition byzantine et emprunts à l’art gothique, parisien en particulier.


FOCUS

Plaquette d’émaux de plique, Paris, vers 1300, Or cloisonné, émaux opaques et translucides
Paris, Musée de Cluny - musée national du Moyen Âge

La technique raffinée et coûteuse des émaux de plique est mise en oeuvre par les orfèvres parisiens à partir de la fin du XIIIe siècle. Mélange d’émaux opaques et translucides sur or, elle connaît un grand succès autour de 1300. Cette plaquette, parfois attribuée à Guillaume Julien, porte aux angles des bélières (anneaux) permettant de la coudre sur un vêtement, civil ou religieux.

© RMN-GP (MUSÉE DE CLUNY - MUSÉE NATIONAL DU MOYEN-ÂGE) / JEAN-GILLE BERIZZI

 

Dans la deuxième moitié du XIIIe siècle, à Paris, les ateliers artistiques se multiplient. Dans les domaines de l’enluminure, de l’orfèvrerie et de l’ivoire, la ville s’impose comme une capitale européenne dont les objets s’exportent dans toute l’Europe occidentale. La troisième salle de l’exposition s’intéresse particulièrement aux transferts technologiques, notamment dans le domaine de l’émail et de l’orfèvrerie. 


FOCUS

Anges dits de Saudemont, Nord de la France, vers 1270-1300, Bois, polychromie, Arras, musée des Beaux-Arts

Ces deux anges font partie des rares sculptures en bois polychrome conservées, en France. Ils faisaient partie d’un groupe plus vaste, portant les instruments de, la Passion (les arma Christi), disposé autour d’un autel majeur, probablement, celui de l’ancienne cathédrale Notre-Dame en Cité. Avec leurs visages doux et, les longs plis soulignant leurs corps, ces sculptures exceptionnelles montrent la, vigueur des liens entre sculpture sur pierre et sur bois.

© Musée des Beaux-Arts d’Arras / Claude Thériez

 

Les premières décennies du XIVe siècle marquent un nouveau basculement. Dans la foulée des commandes royales de Philippe le Bel, l’art français s’adoucit, recherche l’élégance avant la monumentalité. Peintres et sculpteurs toscans portent une nouvelle attention à la matérialité des corps en volume et à l’humanité de leurs sujets, aussi bien dans la sculpture monumentale des tombeaux et des façades que dans celles des intérieurs des édifices.


FOCUS

A gauche : Saint Louis, Paris, Sainte-Chapelle, vers 1300, Bois (if), polychromie, Paris, Musée de Cluny - musée national du Moyen Âge. 

Cette sculpture, l’une des plus anciennes représentations connues de Louis IX, est réalisée dans un bois précieux, l’if. La finesse des plis rappelle les sculptures de la collégiale Saint-Louis de Poissy. L’apparente disproportion entre la tête et le corps s’explique par la position très haute que cette sculpture occupait, probablement tout en haut du pignon de la grande châsse de la Sainte-Chapelle.

© RMN-GP (musée de Cluny - musée national du Moyen-Âge) / Franck Raux
A droite : AGOSTINO DI GIOVANNI, VIERGE DE L’ANNONCIATION, TOSCANE, 1321, BOIS, POLYCHROMIE, PISE, MUSEO NAZIONALE DI SAN MATTEO © Superintendence of Pisa sez. Photo library, SBAAAS PI

 

Qu’il s’agisse de statuaire monumentale ou de figurines portables, la sculpture est largement présente dans l’exposition. Ainsi, au coeur de la galerie, un vaste espace de médiation propose un focus sur les techniques de création des sculpteurs du Moyen Âge. Des échantillons tactiles de matériaux, des outils et des pigments détaillent et explicitent les différentes étapes du processus de création, depuis le choix du matériau jusqu’à la mise en couleurs, en passant par les techniques de taille. 

Pour aller plus loin...

Afin de compléter l'expostion, le Louvre Lens propose des conférences au cours du mois de juillet et septembre : 

Jeudi 9 juillet à 18h
Les jeux en Toscane : le Palio de Sienne et le calcio storico
Par Mauro Civai, auteur et directeur du Musée civique de Sienne.

Jeudi 24 septembre à 18h
Conjurer la peur, Sienne 1348
Par Patrick Boucheron, professeur à Paris I Panthéon-Sorbonne, historien et
éditeur, spécialiste du Moyen Âge et de la Renaissance.

Informations pratiques : 

Dates de l’exposition
27 mai - 28 septembre 2015

Adresse
Musée du Louvre-Lens
99 rue Paul Bert
62300 Lens

T : +33 (0)3 21 18 62 62
www.louvrelens.fr

Horaires d’ouverture
Tous les jours de 10h à 18h, fermé le mardi.
Nocturne jusque 22h les vendredis 5 juin et 4 septembre.
Ouverture du parc tous les jours de 7h à 21h.

Tarifs de l’exposition
Tarif plein : 9 €.
Gratuit pour les moins de 26 ans et les demandeurs d’emploi (liste complète des
exonérations sur www.louvrelens.fr).

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