Exposition Dialogue(s) au couvent dominicain de la Tourette (Rhône-Alpes)

L’exposition Dialogue(s) 2010 au couvent des frères dominicains prolonge une volonté d’ouverture du lieu aux artistes contemporains initiée l’année passée avec François Morellet. Cette année, les frères dominicains de la Tourette ont invité trois artistes à dialoguer avec l’architecture du lieu : Vera Molnar, Stéphane Couturier et Ian Tyson. Cette rencontre entre l’architecture du couvent de La Tourette et ces artistes, qui exposent des œuvres choisies ou créées en fonction d’elle, se propose de renouveler le regard des visiteurs sur le bâtiment à travers des approches, des techniques et des supports très différents.

Dialogue(s) avec Vera Molnar

Propos recueillis par le Frère Marc Chauveau, o.p.

Extrait du catalogue de l’exposition : Rencontre, Le Corbusier / Vera Molnar ; Ian Tyson ; Stéphane Couturier

Comment avez-vous réagi à la proposition des Frères dominicains de mettre certaines de vos œuvres en dialogue avec l’œuvre de Le Corbursier et Xenakis au couvent de La Tourette ?
Pouvoir dialoguer avec Le Corbusier et avec Xenakis est pour moi un véritable cadeau du ciel. Toute jeune, j’admirais déjà Le Corbusier. J’ai vu un grand nombre de ses réalisations avec la certitude – quand on est jeune, on a très vite des certitudes – que sa voie est la seule voie possible en architecture. Sa double casquette d’architecte et de peintre me séduisait aussi.

L’an dernier François Morellet faisait entrer en résonance certaines de ses œuvres avec l’architecture du couvent. Il nous a paru juste que cette possibilité soit également offerte à votre travail. Qu’en pensez-vous ? Quels sont vos liens avec François Morellet ?
Mon sentiment d’être placée dans mon véritable monde visuel et intellectuel se trouve encore renforcé par le passage de François Morellet au couvent de La Tourette en 2009. Une amitié nous lie depuis plus de cinquante ans. Au moment de notre rencontre – une coïncidence – nous avions déjà acquis, chacun de notre côté, un bagage artistique qui coïncidait presque point par point. Cette concordance d’idées de deux peintres venant l’un de Vendée, l’autre du Danube, nous étonne encore aujourd’hui. Nous avons en commun la détestation de « l’artistiquement correct », sentiment qui ne nous a jamais quittés.

Vera Molnar © François Diot

 Oeuvres de Vera Molnar en dialogue avec l'architecture du couvent © François Diot

La démarche artistique de Vera Molnar

Extrait de : reConnaître Vera Molnar, (par Vincent Baby)
Vera Molnar est d'origine hongroise mais vit à Paris depuis 1947. Peintre abstrait de la tendance qui appartient à l'art constructif, dans son acception la plus conséquente, la plus radicale qui soit : celle de l'art systématique dans lequel elle est engagée avec son mari François depuis 1950. Elle a participé à tous les débats qui ont animé la naissance de l'art cinétique et permis la création de la Nouvelle Tendance, montré son travail en 1960 à Zurich dans l'exposition de Max Bill dédiée à l'art concret et est devenue pionnière à partir de 1968 de l'utilisation de l'ordinateur dans la création artistique. Son art, conduit de manière expérimentale, porte sur la forme, sa transformation, son déplacement, sa perception. Il s'agit d'un travail exigent et difficile, jusque dans son rendu, s'appuyant sur des méthodes de la recherche fondamentale et s'accompagnant d'une intense réflexion théorique sur les moyens de la création et les mécanismes de la vision. Il a son origine chez Mondrian, Malévitch et les Concrets zurichois et trouve de nombreuses correspondances dans l'art de François Morellet, Gottfried Honegger et de Manfred Mohr, ainsi que dans tous les travaux conduits en rapport avec les sciences exactes et les mathématiques en particulier.

Extraits du catalogue de l’exposition : Rencontre, Le Corbusier / Vera Molnar ; Ian Tyson ; Stéphane Couturier

Emergence d'une croix © François Diot

Emergence d'une croix © François Diot

Dialogue(s) avec Stéphane Couturier

«Brasilia, « ville pilote » emblématique, ne se raconte pas. Plutôt qu’un récit, nous proposons un plongeon dans les flux de cette ville utopique. La vision de la ville n’est plus faite de choses isolées, aux formes géométriques fixes, mais elle devient une réalité de flux, de mouvements en transformation continue. La vidéo présentée au couvent de La Tourette est constituée de deux enregistrements effectués à l’intérieur du nouveau musée d’Art contemporain de Brasilia. Érigée pratiquement au centre de Brasilia, sur l’axe monumental, la représentation de cette coupole évoque à la fois le centre de la ville avec toute une série de perspectives partant de cet axe, mais aussi un lieu de pause quasiment hors du tumulte de la ville.» Stéphane Couturier, artiste

Stéphane Couturier © François Diot

Biographie de l’artiste

Stéphane Couturier expose depuis 1994 une production personnelle regroupée par séries : la première, Archéologie urbaine, est axée sur les espaces urbains en mutation. Aux Archéologies urbaines succèdent les Villes génériques, les Landscaping. Et enfin la série Melting Point inaugurée avec le travail sur les usines Toyota en 2005.

La ville, l’industrie, les paysages construits sont pour Stéphane Couturier un moyen de questionner le rapport de l’œuvre au sujet représenté. Ce double aspect – l’investigation documentariste indissociable de la recherche plasticienne – caractérise l’ensemble de son œuvre photographique. Ainsi, par les approches que Stéphane Couturier propose, le sujet photographique semble perçu comme un organisme vivant en perpétuelle évolution faite de strates successives. L’accumulation de matières et de cou- leurs, la remarquable frontalité des compositions, permettent de théâtraliser le lieu. Les plans sont écrasés, l’ensemble est traité en aplats éradiquant ainsi toute perspective architecturale.

Extraits du catalogue de l’exposition : Rencontre, Le Corbusier / Vera Molnar; Ian Tyson; Stéphane Couturier

Stéphane Couturier, Vidéo, Brasilia, Musée d’Art contemporain, 2007-2008, HD - durée 2 minutes et 10 sec, en boucle. Courtesy Galerie Paula Reis © François Diot

Dialogue(s) avec Ian Tyson

« Mon travail s’apparente à l’architecture en ce qu’il est construit à partir d’une série de relations spatiales. Lorsque le frère Marc Chauveau m’a invité à exposer mes sculptures au couvent de La Tourette, j’ai relevé ce défi car il me donnait l’occasion exceptionnelle de créer un dialogue entre mes œuvres et la nature spirituelle du bâtiment. Avant cela et dans des contextes différents, j’ai répondu à deux commandes pour lesquelles j’ai été directement confronté à l’architecture, la première pour le domaine viticole de Mourchon à Séguret en Provence, la seconde pour l’université d’East Anglia (Norwich, Grande-Bretagne), qui est située entre la cité universitaire Denys Lasdun et le Centre Sainsbury d’arts plastiques bâti par Norman Foster.

Les constructions de Le Corbusier captent tellement notre regard qu’il n’est pas facile d’établir des liens avec elles. Mais, grâce au modulor, basé sur les proportions du corps humain, notre oeil prend des repères qui permettent d’aligner visuellement dans un même rapport l’architecture et la sculpture qu’on y introduit. Les formes sculpturales peuvent alors entrer en résonance avec celles de l’édifice. » Ian Tyson, artiste

Ian Tyson © François Diot

Sculpture de Ian Tyson en dialogue avec l'architecture du couvent de La Tourette 
© François Diot

Propos de Christine Blanchet, historienne de l’art sur le travail de Ian Tyson

« Ian Tyson réalise des œuvres abstraites de tendance géométrique : il joue avec les rythmes, les couleurs, les lignes et les formes concrètes quels que soient les supports et les techniques employés. Si cette définition résume parfaitement son travail, rien n’indique pourtant l’originalité de sa démarche et de ses aspirations qui en constitue bien évidemment sa singularité.

Depuis la fin des années 1990, l’artiste vit et travaille à Saint-Roman-de-Malegarde, village du Vaucluse au cœur de la Provence. Grâce aux éditions ed.it qu’il crée en 1996, il continue la production de livres originaux qui témoignent progressivement, avec ses reliefs peints et ses sculptures, de son passage à la tridimensionnalité. C’est en effet avec son installation dans le Midi que coïncide sa volonté d’orienter ses travaux dans une voie plus monumentale. En 2006, suite à une commande pour l’université East Anglia en Angleterre, il réalise une sculpture intitulée Proximity en hommage au philosophe Ilham Dilman. Proche de l’édifice de Norman Foster, l’œuvre aux multiples angles répond aux lignes du bâtiment.

Sensible au caractère épuré de l’art cistercien, Ian Tyson puise son inspiration dans les formes simples des abbayes provençales de Silvacane et du Thoronet. »

Extraits du catalogue de l’exposition : Rencontre, Le Corbusier / Vera Molnar; Ian Tyson; Stéphane Couturier

Barrier 1, 2008, Acier, 60 (h) x 230 x 230 cm, Atelier de l’artiste © François Diot

Le catalogue de l’exposition Rencontre, Le Corbusier / Vera Molnar ; Ian Tyson ; Stéphane Couturier est publié aux éditions Bernard Chauveau

Prix public : 20 € / ISBN : 9782915837827
Format : 24 x 30 cm – 64 pages reliées – 55 illustrations couleur

Textes de Vera Molnar, Ian Tyson, Stéphane Couturier, Christine Blanchet, Damien Sausset, frère Marc Chauveau. Il est disponible en libraire et sur le site de l'éditeur. 

Informations pratiques

Coordonnées
Couvent de la Tourette
Route de la Tourette
69210 Eveux - L’Arbresle
04 72 19 10 90
www.couventdelatourette.fr

Horaires
Du mardi au dimanche de 14h30 à 18h
Tarif : 5 €

Visites guidées / Contacts presse
Frère Marc Chauveau
04 72 19 15 25
marc.chauveau@dominicains.fr

Chloé Riegler
06 68 30 27 35
chloe.riegler@hotmail.fr
 

Illustrations des vignettes de UNE : Petite vignette : Affiche de l'exposition : graphisme : beau fixe - photo © François Diot ; grande vignette : Emergence d'une croix © François Diot