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Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

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« Et ils s'émerveillèrent », 40 oeuvres de la Croatie médiévale au musée de Cluny à Paris

Publié le : 6 Novembre 2012
Le musée de Cluny, musée national du Moyen-âge propose, jusqu'au 7 janvier 2013, une très belle exposition réunissant 43 oeuvres, principalement religieuses, issues du Moyen-âge croate. Un émerveillement pour les yeux tant par la qualité des oeuvres présentées que par la scénographie très soignée

« La veille de la Saint-Martin, ils arrivèrent devant Zara en Slavonie, et ils virent la cité fermée de hauts murs et de hautes tours ; et en vain vous auriez demandé une [cité] plus belle, plus forte, ou plus riche. Et quand les pèlerins la virent, ils s’émerveillèrent beaucoup … » Geoffroy de Villehardouin, La Conquête de Constantinople, vers 1210

En pénétrant dans la première salle d’exposition consacrée à la création médiévale croate, nous comprenons bien le sens de cette citation de Geoffroy de Villehardouin qui donne son titre à l’exposition « Et ils s’émerveillèrent ». Les éléments d’architecture et les pièces d’orfèvrerie présentée avec grand soin nous émerveillent dès l’entrée.

 

Salle de l'exposition © Narthex

La Croatie embrassa le Christianisme au IXe siècle au contact des peuples méditerranéens le long du littoral adriatique. Les croates, « Les plus latins des slaves », furent intégrés à cinq siècles d’intervalle, dans deux des plus importants regroupements de l’histoire de l’Europe : l’empire carolingien et le royaume angevin de Hongrie. Les échanges avec les peuples d’orient et d’occident étaient réguliers. La création artistique croate en a bien sûr bénéficié. L’arrivée de manuscrits et de pièces d’orfèvrerie originaires de France, d’Italie, ou de la Sicile normande, est attestée par de rares textes et, surtout, par les œuvres conservées. Des artistes internationaux étaient présents dans les villes de Dalmatie, également à Zagreb.

 

 

L’exposition met en lumière l’exceptionnelle qualité de la sculpture carolingienne et son assimilation à la fois personnelle et profonde de l’héritage paléo-chrétien, grâce aux éléments de jubé ou de chancel de Zadar et Pula. Un ensemble de manuscrits, provenant de Zagreb, Dubrovnik, Split, Zadar, Sibénik et de reliquaires d’or ou d’argent issus de trésors d’églises, soulignent la somptuosité des créations romanes et les échanges actifs à cette époque, tant avec l’Orient qu’avec l’Occident.

 

   

Salles de l'exposition © Narthex

Les visiteurs apprécieront tout particulièrement les reliquaires anthropomorphes, pièces d’orfèvrerie tout à fait remarquables et originales. Michel Huynh, conservateur en chef au musée de Cluny précise le statut et le rôle tout particulier de ces objets : « Ces reliquaires anthropomorphes apparaissent relativement tôt. Celui du pied de saint André, au trésor de la cathédrale de Trèves, vers 977, est l’exemple le plus ancien connu. Au XIIe siècle ils sont présents, parfois en nombre, dans tous les trésors un peu importants d’église et de cathédrale. Si la forme de ces reliquaires évoque directement leur contenu et semble s’y adapter (un radius ou un cubitus dans un bras reliquaire, parfois même visible au travers d’un cristal de roche), la réalité de l’adéquation du contenant au contenu est beaucoup plus complexe, et donne à l’objet une signification et des usages possibles étendus. Le reliquaire de saint André de Trèves ne contient en fait pas le pied de l’apôtre, mais sa sandale, et il renferme également des reliques d’autres saints. Ainsi, de nombreux bras reliquaires, abritant des collections de reliques d’origine diverse, sont figurés dans le geste de la bénédiction ou la main ouverte et ont été utilisés dans la liturgie pour bénir ou toucher les fidèles ou renforcer dans les sermons l’emploi de métaphores liées aux parties du corps tirées des Ecritures. »

 

Deux reliquaires d'un pied de saint Anselme Dalmatie (Zadar ?), 1309 Argent doré, L. 16 ; l. 12 cm Nin, Trésor de l’église Saint-Anselme © Galerie Klovićevi Dvori.

 

Quelques œuvres commentées par les commissaires :

 

Reliquaire du bras de saint Blaise, Palerme ( ?), vers 1185 -1192, Or, émaux cloisonnés sur or, filigranes, pierres précieuses, H. 52, 5 ; D. 9 cm, Dubrovnik, Trésor de la cathédrale 
© Galerie Klovićevi Dvori.

Ce reliquaire est mentionné pour la première fois en 1335 dans l’inventaire le plus ancien de la cathédrale de Dubrovnik. Sur le dessus de la main est fixée une rosette, ornée d’un saphir entouré de perles et de pierres précieuses, sous laquelle est serti un autre saphir, plus petit. L’avant-bras, façonné en forme de cylindre, est traité en bandes horizontales. Le bras de saint Blaise a conservé neuf plaquettes, chacune accompagnée d’une inscription. La rangée supérieure porte les effigies des saints patrons de Dubrovnik, les frères Pierre, Laurent et André (Pierre est perdu), ainsi que Nérée, Achille et Blaise (enlevé et appliqué sur le reliquaire de la tête de saint Blaise). Les deux rangées inférieures représentaient principalement les apôtres. L’un des douze apôtres avait cédé sa place au prophète Siméon, dont le culte était très présent à Dubrovnik au Moyen Age. En effet, le monastère Saint-Siméon conservait un lange dans lequel l’Enfant Jésus avait été emmailloté lorsque Siméon l’avait pris dans ses bras au Temple.

Ce reliquaire présente d’étroits parallèles stylistiques avec certains objets d’orfèvrerie provenant d’Italie méridionale, notamment la staurothèque de Cosenza, en Calabre. Il a sans doute été exécuté par un orfèvre formé à Palerme, capitale du royaume normand de Sicile, probablement pendant la brève période de pouvoir des Normands à Dubrovnik, entre 1185 et 1192.

 

Vierge à l’Enfant et onze apôtres, Dalmatie, première moitié du XIVe siècle, Argent, repoussé et ciselé, H. 63 ; L. 40 cm, Split, Trésor de la cathédrale © Galerie Klovićevi Dvori

Assise sur un coussin posé sur un riche trône dépourvu de dossier, la Vierge est vêtue d’une robe et d’un grand voile qui couvre sa tête et ses épaules. Les plis abondants aux cassures assouplies et fluides, relèvent du style gothique. Du bras gauche, elle soutient l’Enfant et le tient serré contre son flanc. Elle accompagne ce geste en inclinant légèrement sa tête vers l’Enfant, dont le regard est levé vers le visage de sa mère. Leurs joues toutes proches accentuent l’intimité qui se dégage de cette scène. L’approche narrative du maître s’exprime par ailleurs dans l’attitude enjouée de l’Enfant, dont les pieds reposent sur la cuisse de sa mère, tandis que le drapé animé de son vêtement couvre son corps replet. De la main droite, il saisit le maphorion (voile) de sa mère, tandis que sa main gauche tient fermement un rouleau.

Le groupe est traité de façon résolument monumentale, comme s’il s’agissait d’une sculpture sur marbre. Plusieurs aspects de l’iconographie rappellent les modèles byzantins, néanmoins la plastique, et en particulier l’approche narrative dans le traitement de l’ensemble de la composition, surtout perceptible dans la douce complicité qui réunit les protagonistes, témoignent que l’artiste accompli qui exécuta cette oeuvre avait acquis au cours de sa formation une expérience qui dépassait largement ce que pouvait offrir la production artistique de la Venise de l’époque.

L’exposition du musée de Cluny, à taille humaine, permet d’apprécier chacune des œuvres présentées, de saisir son contexte de fabrication et son histoire. Encore une fois, nous insistons sur la scénographie simple mais judicieuse qui met à l’honneur la beauté de ces pièces exceptionnelles du patrimoine croate. Emerveillement garanti.

 

Commissaires de l’exposition :
Nikola Jakšić, Professeur émérite de l’Université de Zadar.
Miljenko Domijan, Conservateur en chef, Ministère de la Culture croate.
Élisabeth Taburet-Delahaye, Directrice du musée de Cluny, Paris.
Michel Huynh, Conservateur en chef au musée de Cluny, Paris.

Exposition organisée par le musée de Cluny – musée national du Moyen Âge, la Réunion des musées nationaux-Grand Palais, le Ministère de la Culture de la République de Croatie, la Galerie Klovićevi Dvori de Zagreb et l’Institut français dans le cadre de « Croatie, la voici », festival de la Croatie en France (septembre-décembre 2012). www.croatielavoici.com

 

Activités autour de l’exposition

VISITES AVEC CONFÉRENCIER
Les mercredis du 17 octobre 2012 au 2 janvier 2013
À 15h45 - Durée 1h

UN MOIS / UNE OEUVRE
Jeudi 8 novembre 2012
À 12h30 et 18h30 - Durée 1h

Présentation de l’exposition par les commissaires : Élisabeth Taburet-Delahaye, conservateur général, directrice du musée et Michel Huynh, conservateur en chef.

Publication :
Catalogue de l’exposition, Éditions
RMN-GP, 2012 - 96 pages, 22 €.

 

Informations pratiques :

Musée de Cluny
Musée national du Moyen Âge
6 place Paul Painlevé
75005 Paris
Tél : 01 53 73 78 16
www.musee-moyenage.fr

Horaires :
Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9h15 à 17h45.
Fermeture de la caisse à 17h15.
Fermé le 25 décembre et le 1er janvier.

Accès :
Métro Cluny-La-Sorbonne /Saint‑Michel / Odéon
Bus n° 21 – 27 – 38 – 63 – 85 – 86 – 87
RER lignes B et C Saint-Michel –Notre-Dame

Tarifs :
8 € tarif réduit 6 € incluant les collections permanentes
Gratuit pour les moins de 26 ans (ressortissants de l’UE ou en long séjour dans l’UE) et pour tous les publics le premier dimanche du mois.

twitter.com/museecluny - Commentez et partagez sur Twitter

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