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L'orgue néo-classique dans l'histoire de l'orgue français

Publié le : 16 Novembre 2012
Il n'est pas inutile de situer brièvement l'orgue néo-classique dans l'histoire de l'orgue.Le développement de l'orgue néo-classique, dont la redécouverte de la pureté de la facture des instruments baroques a mis un terme dans les années 1970, s'est appuyé sur des personnalités et des institutions qui ont joué un rôle majeur. François Mazoüer nous raconte son histoire !

Il n'est pas inutile de situer brièvement l'orgue néo-classique dans l'histoire de l'orgue. Pour résumer simplement, nous retiendrons deux grandes périodes dans l'histoire de l'orgue en France avant le XXème siècle :

 

• A l'époque baroque, l'orgue classique français, issu de l'instrument flamand du XVIème siècle, dont la luxuriante palette sonore permet de commenter l'acte liturgique avec tout le faste et le décorum qu'exige la contre-réforme et que favorise le goût du siècle de Louis XIV.

 

• Dans la seconde moitié du XIXème siècle (le premier jalon en étant l'orgue de Saint-Denis – 1841), l'orgue symphonique dû au génie du facteur Aristide Cavaillé-Coll et mis en valeur par la musique de César Franck, père de la musique dite symphonique pour orgue. Cette orgue regroupe ses timbres (« jeux ») en différents plans sonores illustrant ceux de l'orchestre : « jeux de fonds » pour les cordes, « jeux d'anches » pour les bois et pour les cuivres, la boîte expressive permettant les effets de crescendo et decrescendo. A contrario, les jeux plus brillants (mixtures et mutations), largement utilisés dans tous les instruments baroques en Europe – ne serait-ce qu'en Allemagne pour les grandes polyphonies ou pour préluder au choral - sont progressivement abandonnés.

 


La fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle ont été marqués par un certain nombre d'évolutions majeures qui impactèrent le monde de l'orgue :

 

• La redécouverte du répertoire ancien.

 

• Publication par Alexandre Guilmant, organiste de la Trinité de 1871 à 1911, des « Archives des Maîtres de l'Orgue Français » : ces éditions d'œuvres pour orgue des musiciens français des XVIIème et XVIIIème siècles – de Titelouze à Clérambault en passant par François Couperin et Nicolas de Grigny – sont encore aujourd'hui reconnues pour leur qualité musicologique.

 

• Travaux d'Albert Schweitzer et d'André Pirro sur J-S.Bach, dans les années 1895 – 1905.

 

• La « laïcisation » de l'instrument : l'église n'est plus le lieu exclusif où l'on peut écouter de l'orgue qui va au-devant de son public, soit par la multiplication des instruments de salon, soit par la création de grands instruments dans quelques salles de concert ; le plus prestigieux fut celui du Trocadéro dès 1878, déplacé et transformé au Palais de Chaillot en 1938 (puis transféré en 1977 à Lyon, à l'auditorium Maurice Ravel). Les concerts donnés sur ces instruments manifestent cette ouverture à un très large répertoire.

• Le retour aux sources grégoriennes : par le Motu Proprio « Tra le sollecitudini » du 22 novembre 1903, le pape St Pie X donne ses instructions à l'Eglise en matière de musique sacrée en donnant au chant grégorien une place centrale et première. Il s'en suivra la diffusion large, à partir de 1905, des livres de chant grégorien de l'Edition Vaticane, issus des travaux de l'abbaye bénédictine de Solesmes.


La Schola Cantorum, fondée à Paris en 1894 par Charles Bordes avec la collaboration d'Alexandre Guilmant et de Vincent d'Indy, participe de ce mouvement : « école de chant liturgique et de musique religieuse » qui se proposait de réagir contre la décadence de la musique sacrée, elle joua un rôle important dans la redécouverte de la musique ancienne.


Les compositeurs d'orgue trouveront leur inspiration dans le chant grégorien : qu'il s'agisse par exemple de l'usage de la modalité grégorienne (remise notamment à l'honneur par Eugène Gigout, organiste de Saint-Augustin de 1863 à 1925) ou de l'illustration de l'ensemble du répertoire grégorien de l'année liturgique au travers de l'immense fresque de l'« Orgue mystique » composée par Charles Tournemire (organiste de Sainte-Clotilde de 1898 à 1939). Ils seront suivis par bien d'autres au fil du XXème siècle (Maurice Duruflé, Jean Langlais, Olivier Messiaen...).

 

• Le modernisme : le développement de techniques nouvelles (électricité, pneumatique) s'est progressivement immiscé dans la facture d'orgue, dans le but de faciliter le jeu d'instruments plus grands (pour alléger la mécanique d'instruments ayant de nombreux claviers) voire pour multiplier les possibilités de combinaison et d'extension de sonorités.

 

Les principes de l'orgue néo-classique

 

 

Grandes orgues de la cathédrale Saint-Gervais-et-Saint-Protais de Soissons

 

Le contexte que nous venons d'évoquer précédemment a favorisé l'éclosion d'un instrument dont l'ambition est de permettre l'exécution de toute musique d'orgue quelle qu'en soit l'époque. Il s'agit de l'orgue néo-classique : « instrument constitué par les fonds et les anches de Cavaillé, éclairés par les mixtures anciennes, et équilibrés d'autre part en raison du nouvel apport des fonds modernes », selon ses promoteurs (congrès de l'orgue de Strasbourg en 1932).

« La bonne formule consiste dans une synthèse des deux systèmes qui combinerait, et de façon très rationnelle, les trois éléments constitutifs de cet instrument : jeux de fond, jeux de mutation, jeux d'anches. On obtient ainsi l'orgue du XXème siècle qui réunit les ressources de l'orgue symphonique et de l'orgue ancien » (Gaston Litaize, 1948).

L'orgue néo-classique est source d'inspiration pour de nouveaux compositeurs qui utilisent toute la palette sonore de ces nouveaux instruments au travers de combinaisons de timbres originales et audacieuses ; quelques noms parmi les principaux :


• Charles Tournemire, déjà cité,


• Olivier Messiaen (organiste à la Trinité de 1931 à 1992), musicien d'une haute spiritualité ayant marqué de façon originale par son langage tout le XXème siècle,


• Jehan Alain, mort à la guerre en 1940 à l'âge de 29 ans, dont la musique rayonne de liberté,


• Maurice Duruflé (organiste à Saint-Etienne-du-Mont de 1930 à 1986), laissant une œuvre peu abondante mais d'une qualité exceptionnelle,


• Jean Langlais (organiste à Sainte-Clotilde de 1945 à 1991), musicien fécond dont la musique a évolué d'un langage modal vers un langage plus contemporain, sans s'écarter de l'inspiration grégorienne,


• André Fleury (successivement organiste à Saint-Augustin, Sainte-Bénigne de Dijon, Saint-Eustache et à la cathédrale de Versailles),


• Gaston Litaize (organiste à Saint-François-Xavier de 1946 à 1991).

 

Les vecteurs de promotion de l'orgue néo-classique

 

 

 

Tuyaux d'orgue - Orgue de choeur de Saint-Louis en l'île, Paris (c) CGC

 

Le développement de l'orgue néo-classique, dont la redécouverte de la pureté de la facture des instruments baroques a mis un terme dans les années 1970, s'est appuyé sur des personnalités et des institutions qui ont joué un rôle majeur :

 

• L'Association des Amis de l'Orgue dont les concours ont révélé des compositeurs majeurs (Maurice Duruflé, Jehan Alain, Olivier Messiaen, Jean Langlais...) et dont les concerts-conférences, au milieu des années 1930, permettaient de présenter des programmes très éclectiques.

 

• Des concertistes de renommée internationale, qui, dans la lignée d'Alexandre Guilmant et de Louis Vierne, ont fait rayonner l'école d'orgue française – notamment André Marchal (1894-1980).

 

• Un théoricien de l'orgue, l'organiste et musicologue Norbert Dufourcq (1904-1990), dont les conférences musicales ont commenté nombre des manifestations de l'orgue à cette époque.

 

• Un facteur d'orgue, Victor Gonzalez (1887-1956), qui a réalisé nombre d'instruments relevant de l'esthétique néo-classique. L'instrument actuel de St Louis de Vincennes, inachevé, a été réalisé par ce facteur en 1954, en partie avec du matériel de récupération (à commencer par la console).

 

Et maintenant...

 

Dès la fin des années 1960, la redécouverte des instruments anciens, de leur facture et les recherches sur l'interprétation de la musique baroque ont mis un terme à l'orgue néo-classique, réfutant le concept d'instrument « à tout jouer ». Cette petite révolution était certes salutaire sur le plan du respect de la facture ancienne et du renouveau d'une interprétation plus conforme aux traités anciens.

 

Il n'en reste pas moins vrai que nous disposons d'un immense répertoire, composé dans les années 1900 - 1960 par tous ces organistes dont nous avons parlé, pour une esthétique relevant en grande partie de l'orgue néo-classique. La valeur de ce patrimoine musical mérite certainement que des orgues de qualité existent qui le mettent en valeur.

 

François Mazoüer, le 15 novembre 2012

Valérie de Maulmin
Valérie de Maulmin a écrit :
09/11/2020 09:36

Merci pour votre lecture attentive !

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« L’Association pour la mise en valeur de l'église Saint-Louis de Vincennes et Saint-Mandé » porte conjointement le projet de restauration de l'église Saint-Louis et le projet de construction de l'orgue en liaison avec la paroisse et le Diocèse de Créteil, propriétaire de l'édifice. A cet égard, une équipe de trois personnes formera le noyau des contributeurs au blog : Paul Guillaumat pour ce qui concerne l'église, son histoire et sa restauration ; Claude de Martel, Président de l'Association, pour ce qui concerne l'ingénierie des projets et leur portage associatif et François Mazouër pour le projet d'orgue et la vie culturelle associée.

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