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Narthex - Art Sacré, patrimoine, création.

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Que tout ce qui respire atteigne le bonheur

Publié le : 24 Septembre 2018
Ce rêve n’est-il pas de tous les temps ? Les artistes ont, sans doute plus que d’autres, la capacité de survoler les époques, de les réunir, de les rendre contemporaines les unes des autres et de nous-mêmes. Voici un exemple musical de la permanence toujours pareille et toujours renouvelée : un texte très ancien, une œuvre de début du 20ème siècle, un monde toujours à construire.

Lili Boulanger

Lili Boulanger est née en 1893 dans une famille d’origine russe : elle s’appelait en réalité Marie-Juliette Olga. Elle fut la première femme qui obtint le Premier Grand Prix de Rome en 1913. Malheureusement elle mourut en 1918, elle avait à peine 25 ans… Emile Vuillermoz dans sa fameuse Histoire de la Musique écrit : « Lili Boulanger […] dont le talent précoce s’affirmait de la façon la plus émouvante dans des œuvres comme Clairières dans le ciel, Trois psaumes, Reflets, les Funérailles d’un soldat… »

C’est une page moins connue de cette créatrice que je vous propose de découvrir. Il s’agit d’une œuvre pour ténor, chœur et orchestre intitulée : « Vieille prière bouddhique » écrite en 1917, une année douloureuse où la guerre semble vouloir s’éterniser. Poète oriental, musicienne occidentale et interprètes d’aujourd’hui  s’unissent pour donner vie à ce texte qui résonne et résonnera toujours au cœur de l’humanité souffrante victime de la guerre. Voici ce texte :

Que toute chose qui respire, sans ennemis, sans obstacle, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puisse se mouvoir librement, chacun dans la voie qui lui est destinée.

Que toutes les créatures et partout, tous les esprits et tous ceux qui sont nés sans ennemis, sans obstacle, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puissent se mouvoir librement chacun dans la voie qui lui est destinée.

Que toutes les femmes, que tous les hommes, les Aryens et les non Aryens, tous les dieux et tous les humains et ceux qui sont déchus, sans ennemis, sans obstacle, surmontant la douleur et atteignant le bonheur, puissent se mouvoir librement, chacun dans la voie qui lui est destinée.

En Orient, en Occident, au Nord et au Sud, que tous les êtres existent sans ennemis, sans obstacle, surmontant la douleur et atteignent le bonheur, puissent se mouvoir librement chacun dans la voie qui lui est destinée. 

Je vous propose une petite expérience musicale : même si vous ne connaissez pas la musique, vous pouvez vous y livrer : cela permet des découvertes surprenantes. Lisez tranquillement ce texte puis imaginez une musique qui vous semblerait convenir. N’hésitez pas à prendre un peu de temps pour que ce texte et la musique que vous imaginez vous imprègnent. Alors seulement, écoutez ce que nous donne Lili Boulanger ; cela sera sans doute très différent de ce que vous envisagiez mais cela vous permettra de percevoir et de goûter ce qu’une musique inattendue peut apporter à une poésie.

Pour nous aider dans l’écoute, voici quelques clés : la forme incantatoire du texte, comme une litanie, est renforcée par le thème insistant, omniprésent, comme une prière toujours répétée à la manière orientale, le tout sur une note tenue soit au-dessous soit au-dessus : nous ne sommes pas loin d’une liturgie. La deuxième strophe reprend la même musique, mais c’est l’orchestre qui chante le thème de l’incantation. Remarquez le sommet mélodique et dynamique sur les mots se mouvoir librement que la musicienne ressent comme essentiels. Un très beau solo de flûte prolonge la méditation.

C’est le ténor solo qui proclame la troisième strophe : quand un texte est chanté par un soliste et non plus par un ensemble, il gagne une autre saveur ; c’est une personne et non plus un groupe qui s’adresse à chacun de nous. Enfin la quatrième strophe éclate après un silence d’une grande densité : le chœur projette l’incantation sur un unisson qui en renforce la puissance jusqu’à la coda finale.

 

Emmanuel Bellanger

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Agnès
Agnès a écrit :
27/01/2020 17:16

vraiment très beau

Valérie de Maulmin
Valérie de Maulmin a écrit :
28/01/2020 11:57

merci pour votre commentaire !

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Emmanuel Bellanger

Après des études au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris et à l’Institut Grégorien, Emmanuel Bellanger a mené une carrière d’organiste comme titulaire de l’orgue de Saint Honoré d’Eylau à Paris, et d’enseignant à l’Institut Catholique de Paris : Institut de Musique Liturgique et Institut des Arts Sacrés (aujourd’hui ISTA) dont il fut successivement élu directeur. Ancien responsable du département de musique au SNPLS de la Conférence des évêques de France, il est actuellement directeur du comité de rédaction de Narthex. Il s’est toujours intéressé à la musique comme un lieu d’expérience sensible que chaque personne, qu’elle se considère comme musicienne ou non, est appelée à vivre.

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