Quatrième semaine des Exercices spirituels d’Ignace de Loyola (fin)
Publié le : 21 Mai 2015Que signifie le « discernement des esprits » ?
La notion de « discernement » est caractéristique de la spiritualité jésuite, mais ce terme nécessite quelques explications. Discerner vient du latin « discernere », qui signifie séparer, distinguer. D’où le premier sens de « percevoir distinctement (un objet) de manière à éviter toute confusion ». Le second sens est celui de « se rendre compte précisément de la nature, de la valeur de quelque chose, et de faire la distinction entre deux choses mêlées, confondues ».
Quelles sont les quatorze règles du discernement des esprits ?
1. Il faut d’abord discerner dans les mouvements de l’âme s’ils viennent du bon esprit ou du mauvais (§313). Ainsi pour ceux qui succombent au péché, l'ennemi les entretient dans les plaisirs, les jouissances et les voluptés sensuelles, et les enferre dans leurs péchés. Le bon esprit, au contraire, agit comme un aiguillon de la conscience (§314).
2. Chez les personnes qui veulent servir Dieu, le mauvais esprit sème en elles le trouble, tandis que le bon esprit les encourage et les pacifie (§315).
3. La troisième règle définit la consolation spirituelle : « J'appelle consolation un mouvement intérieur qui est excité dans l'âme, par lequel elle commence à s'enflammer dans l'amour de son Créateur et Seigneur, et en vient à ne savoir plus aimer aucun objet créé sur la terre pour lui-même, mais uniquement dans le Créateur de toutes choses (…) J’appelle consolation toute augmentation d'espérance, de foi et de charité, et toute joie intérieure (…)» (§316).
4. La quatrième règle définit la désolation spirituelle : « J'appelle désolation le contraire de ce qui a été dit dans la troisième règle: les ténèbres et le trouble de l'âme, l'inclination aux choses basses et terrestres, les diverses agitations et tentations qui la portent à la défiance, et la laissent sans espérance et sans amour, triste, tiède, paresseuse, et comme séparée de son Créateur et Seigneur » (§317).
5. La cinquième règle consiste à ne rien changer, au temps de la désolation, mais de demeurer ferme dans ses bonnes résolutions antérieures (§ 318).
6. Cependant « il est très utile de nous changer courageusement nous-mêmes », et de combattre la désolation par un temps de prière accentué et une méditation plus attentive (Sixième règle §319).
7. La désolation est un temps d’épreuve, où on est laissé à ses puissances naturelles, mais où la grâce divine continue d’agir même si elle n’est pas ressentie (Septième règle §320).
8. D’où la nécessité de la patience (Huitième règle §321).
9. La désolation peut avoir trois causes : la première vient de nous-mêmes. « Notre tiédeur, notre paresse, notre négligence dans nos exercices de piété, éloignent de nous la consolation spirituelle ». « Secondement, elle est une épreuve. Dieu veut éprouver ce que nous pouvons, et jusqu'à quel point nous sommes capables de nous avancer dans son service et de travailler à sa gloire, privés de ces consolations abondantes et de ces faveurs spéciales. Troisièmement, elle est une leçon. Dieu veut nous donner la connaissance certaine, l'intelligence pratique et le sentiment intime qu'il ne dépend pas de nous de faire naître ou de conserver dans nos coeurs une dévotion tendre, un amour intense accompagné de larmes, ni aucune sorte de consolation spirituelle; mais que tout est un don et une grâce de sa divine bonté; il veut nous apprendre à ne pas placer trop haut notre demeure, en permettant à notre esprit de s'élever et de se laisser aller à quelque mouvement d'orgueil ou de vaine gloire (…) » (Neuvième règle §322).
10. Il faut faire provision de courage dans la consolation pour le temps de désolation (§323).
11. « Celui qui est dans la désolation se rappellera qu'il peut beaucoup avec la grâce, qu'elle lui suffit pour résister à tous ses ennemis, pourvu qu'il s'appuie sur le secours de son Créateur et Seigneur » (§324).
Dans les trois dernières règles (§325 à 327), Ignace de Loyola développe une triple comparaison : « Notre ennemi ressemble à une femme: il en a la faiblesse et l'opiniâtreté ». « La conduite de l’ennemi est encore celle d'un séducteur: il demande le secret et ne redoute rien tant que d'être découvert ». « Enfin, il imite un capitaine qui veut emporter une place où il espère faire un riche butin. Il assoit son camp, il considère les forces et la disposition de cette place, et il l'attaque du côté le plus faible. Il en est ainsi de l'ennemi de la nature humaine ».